1882 |
2 juin 1882
Vincent Audren de Kerdrel à Alfred de Falloux
Paris (16, rue de Grenelle), 2 juin 1882
Le bon abbé Bourdon1 s'est trompé mon cher ami. Je ne lui ai pas dit que la lettre de Pontmartin ait eu un écho quelconque dans la Gazette. Je lui ai seulement lu cette lettre qui a paru lui causer la même satisfaction qu'à moi-même. Je vous l'envoie au surplus pour que vous puissiez apprécier la légitimité de cette satisfaction et j'y joins deux mots de commentaires. J'avais maladroitement oublié mes quelques rencontres avec M. de Pontmartin chez Janicot2 et lui avait exprimé le regret d'être beaucoup moins connu de lui qu'il ne l'était de moi. C'est à cette distraction que mon correspondant fait allusion et répond de la manière la plus gracieuse à la fin de son épître, il ne réfute plus, il se défend, mais en plaidant les circonstances atténuantes, et non en maintenant les termes de la petite querelle qu'il nous avait cherché un peu, je crois, pour faire admettre plus facilement de centaines de gens, les éloges qu'il vous a donné. Dans la lettre que je lui ai écrite pour le remercier, et le féliciter de ses deux articles, il fallait bien que je mêlasse quelque critique à la louange pour ne pas permettre le moindre doute sur ma sincérité. Ma critique n'était du reste que la déclaration de la vérité pure. J'ai soutenu que M. Nettement avait bien réellement joué le rôle que vous lui avez attribué. J'ai ajouté qu'à cet égard vous pourriez en dire beaucoup plus long que vous ne l'aviez fait, et, qu'à l'aide de souvenirs très précis et très prudents, il me serait facile, à moi-même de démontrer que non seulement dans la question de la révision, mais que dans toutes les questions, Nettement avait obéi à la consigne de M. de Saint Priest et combattu, un peu sournoisement, et d'accord avec les Orléanistes intransigeants, avec M. Chambolle3 leur organe, la politique de Berryer, la votre, mon bon ami. Voilà le petit commentaire que je vous avais annoncé - j'ai fait votre double commission dans le but et dans les termes, je l'espère que vous souhaitiez. Et d’abord un mot de rectification, vous n'avez pas envoyé votre beau livre à mes deux collègues, en même temps qu'à moi, vous me l'avez donné en mains propres, avec une dédicace qui m'est bien chère. Enfin vous l'avez adressé à mes 2 collègues et ils l'ont reçu. Voici maintenant leurs excuses respectives. Chesnelong est allé vous chercher pour vous remercier de vive voix, et si j'en juge par ma causerie avec lui, ce matin, dans des termes qui vous aurait [sic] touché. Mais vous veniez de partir, puis Chesnelong a appris la mort de Mme de Caradeuc et il n'a pas voulu mêler à ses condoléances des félicitations et des remerciements. Il avait pourtant déjà commencé une lettre, il va la compléter maintenant et vous verrez s'il est content de vous. Quant à La Sicotière4, il a perdu sa fille aînée et n'a guère fait tous ces temps-ci, que répondre aux lettres des nombreux amis qui lui ont témoigné leurs douloureuses sympathies. De ce côté là non plus, vous ne perdrez rien pour ne pas avoir attendu. Vous ne me parlez pas d'un nouveau voyage à Paris où je veux encore et espère vous revoir. Votre vieil ami. A de K.