CECI n'est pas EXECUTE 5 mars 1859

Année 1859 |

5 mars 1859

Pierre Louis Parisis à Alfred de Falloux

Arras, le 5 mars 1859

Monsieur le Comte,

Je viens de lire dans l'Orléanais1 l'admirable article que vous avez publié sur la Question italienne2, et quoique nos relations aient été suspendues par suite de dissentiments sur des questions secondaires3, je ne résiste pas au désir de vous adresser mes affectueuses félicitations sur ce magnifique et lumineux exposé. De la question principale, où la foi inébranlable du chrétien parle d'accord avec le sentiment élevé de l'homme d'État.

Mais permettez-moi de vous avouer combien je gémis de voir ce bel article profondément attaché par des paroles injurieuses et des accusations violentes contre des hommes de talent, de courage et de foi, qui combattent exactement pour la sainte cause que vient de vous inspirer ces lignes éloquentes et qui n'ont d'autre tort que de comprendre autrement que vous la marche et les chances du combat. Voilà plus de deux ans qu'on les attaque sans relâche comme sans raison de votre côté, Monsieur le Comte, et qu'ils s'abstiennent de la moindres représailles. Croyez-vous que s'ils le voulaient, ils n'auraient rien à reprendre ; et, pour ne parler que de ce qui me regarde, jamais l'Univers s'est-il permis à l'égard d'un évêque la dérision et les insultes que l'Ami de la religion4 a consigné contre moi dans ses colonnes ? Et qu'avais-je fait ? Pas autre chose que défendre des catholiques éminents que je croyais et que je crois encore digne de haute estime et de reconnaissance particulière. Et pendant qu'on livre ainsi au ridicule un évêque qui a rendu des services et qui obéit à sa conscience, on a pour système et l'on se fait gloire de combler d'égards tous les ennemis de la Religion. Cela n'empêchera pas que, comme toujours on accusera l'Univers et ses protecteurs d'être seuls coupables d'imprudence et de félonie !…

Je n'avais pas l'intention de me laisser aller à ces représentations ; mais je ne les regrette pas parce que vous êtes plus que personne capable de les apprécier. On parle beaucoup d'une lettre que vous auriez écrite à l'un de vos amis sur la conduite tenue par Mgr de Rennes5 à l'époque du voyage de l'Empereur. Voudriez-vous bien m'en envoyer un exemplaire.

Quoi qu'il en soit, veuillez, Monsieur le Comte, accueillir cette lettre comme un nouveau témoignage de mes sentiments respectueux et dévoués.

P. Ev. d'Arras

Notes

1Journal légitimiste et catholique du Loiret.
2Reproduit dans Le Correspondant du 25 février 1859, cet article de Falloux critiquait violemment la politique impériale vis-à-vis de Rome.
3Si Mgr Parisis, évêque d'Arras, a accepté la loi Falloux, il s'était néanmoins abstenu lors du vote. Après avoir désapprouvé la trop grande vivacité des attaques de L. Veuillot contre cette loi, il avait fini par se rallier à ses positions et à entrer à ses côtés en lutte contre les catholiques libéraux.
4Depuis sa  reprise en main par Mgr Dupanloup et surtout depuis la loi Falloux, l'Ami de la Religion ne ménage pas L'Univers, le journal de L. Veuillot qui s'est violemment opposé à cette loi qu'il juge détestable n'y voyant qu' « une monstrueuse alliance des ministres de Satan avec ceux de Jésus-Christ. »
5Mgr Brossais de Saint-Marc. Voir à ce sujet la lettre de P.-A. Berryer à  A. de Falloux du 4 mars 1859.  

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «5 mars 1859», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, Année 1859, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES,mis à jour le : 05/01/2023