Année 1841 |
3 novembre 1841
Henri Lacordaire à Alfred de Falloux
Paris, 3 novembre 1841
Monsieur et cher ami,
Mme Swetchine, notre amie commune, m'a lu un passage de la dernière lettre que vous lui avez écrite, et qui est venue bien à propos pour m'encourager à vous demander une grâce. Je fonde en ce moment, sous le nom d’Œuvre dominicaine, une sorte d'association pour le soutien de nos dominicains français. Depuis trois ans, j'ai supporté seuls les frais de cette entreprise, et il me serait impossible, au point de développement où elle est déjà parvenue, de poursuivre avec mes propres fonds. J'ai donc songé à faire, comme toutes les autres œuvres catholiques, un appel aux catholiques amis, et j'ai besoin d'un conseil à la tête de ce projet. M. de Montalembert a accepté d'être membre de notre conseil ; nous aurons M. Desgenettes1, curé de Notre-Dame-des-Victoires, et d'autres personnes recommandables de toutes les opinions honnêtes. Mme Swetchine est une de nos trésorières. J'ai pensé, Monsieur et cher ami, que vous m'aimiez assez pour accepter une place dans notre conseil, place qui ne vous donnera que la responsabilité morale du patronage des Dominicains français, et la faculté d'assister à des réunions peu fréquentes, où l'on délibérera sur les questions auxquelles notre établissement en France pourrait donner lieu. Si vous agréez ma demande, veuillez me le faire savoir le plus vite possible, parce que je travaille au prospectus qui contiendra, à la suite d'un exposé de l’œuvre, les noms des membres du conseil. Ce prospectus n'est destiné à aucune publicité, mais seulement à être remis aux personnes amis de l’œuvre, comme exhortation à la soutenir selon leurs moyens. Je suis à Paris pour peu de temps, devant aller prêcher à Bordeaux et ensuite à Nancy, pendant la seconde moitié de l’hiver. J'ai été bien heureux d'apprendre, Monsieur et cher ami, le bonheur dont vous jouissez2, et dont votre cœur est si digne. Je prie Dieu de lui donner la plus longue durée, c'est-à-dire celle du temps et de l'éternité et je vous embrasse dans cette espérance qui fait parti de celles qui me sont les plus chers. Tout à vous toujours.
Fr. Henri-Dominique Lacordaire, des Fr. Prêch.
