CECI n'est pas EXECUTE 15 septembre 1857

Année 1857 |

15 septembre 1857

Henri Lacordaire à Alfred de Falloux

Sorèze, 15 septembre 1857

Mon cher ami,

J'ai reçu hier soir, en revenant d'une course à Toulouse, votre lettre du 12, et une autre du prince Albert de Broglie. Vous me demandez tous les deux d'écrire quelque chose dans le Correspondant sur notre digne amie1, et je le ferai volontiers, mais non pas pour le numéro de ce mois, par ce que cela me serait impossible. Il vaut mieux retarder d'ailleurs et mieux faire. J'ai mis plusieurs mois à composer la notice d'Ozanam2, et elle n'y a rien perdu. Toutefois il me serait nécessaire d'avoir sur les origines et les premiers temps Swetchine, ses rapports avec le comte de Maistre3, sa conversion, sa venue en France, des détails qui me manquent complètement. Je vous prie de demander à ses neveux et de me les envoyer le plus tôt possible. Quelques dates, quelques faits, me seront d'un précieux secours. Quand on n'a pas ces jalons positifs et assurés, on est arrêté à chaque pas ; tout perd de sa netteté et par conséquent de son intérêt. Quand à ma correspondance avec cette chère amie4, je ne comprends pas bien comment elle pourrait être publiée avant ma mort, supposé qu'elle doive l'être. Je ne sais pas s'il y a exemple d'une correspondance intime publiée du vivant de l'auteur. Les lettres ont un caractère de révélation personnelle, qui semble exclure la publicité, au moins pendant que l'on vit. Nous en reparlerons plus à l'aise, et j'espère que ce sera à Sorèze, bien que le Bourg d'Iré m'attire vers lui.

Le souvenir que m'a légué Mme Swetchine me suffit. Je vous prie de faire emballer ce tableau pour Sorèze, gare de Castelnaudary, ou de donner cette indication à qui de droit. Adieu, mon cher ami, répondez-moi bientôt pour les notes que je sollicite. Tout à vous in altissimis Dei.

Fr. Henri-Dominique Lacordaire, des Fr. Prêch.

*Lettre publiée dans Le Correspondant du 10 juin 1911.

Notes

1Madame Swetchine.
2Frédéric Ozanam, Paris, Ambroise Bray, 1866.
3Joseph de Maistre  (1753-1821), philosophe. Savoyard, il était sujet du roi de Piémont-Sardaigne. Magistrat au Sénat de Savoie comme son père, il quitta la Savoie à l'arrivée des troupes françaises en septembre 1792 et se réfugia en Piémont puis en Suisse. Il publia, en 1797, son premier ouvrage Les considérations sur la France. Rentré en Italie en 1799, il fut chargé par le roi de Sardaigne de le représenter auprès du tsar. Il resta en poste à Saint-Pétersbourg jusqu'en 1817. Revenu en Italie, il mourut à Turin. Auteur de plusieurs ouvrages, Essai sur le principe générateur des constitutions politiques (1814), Du Pape (1819) et Les Soirées de Saint-Pétersbourg (ouvrage publié en 1821 peu après sa mort), De Maistre, comme De Bonald refusa tout compromis avec les principes nouveaux issus de la révolution. Joseph de Maistre et Mme Swetchine, sur laquelle Falloux écrivit une biographie, avaient lié connaissance en Russie.
4Falloux envisageait alors la publication de la correspondance de madame Swetchine.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «15 septembre 1857», correspondance-falloux [En ligne], BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Second Empire, Année 1852-1870, Année 1857,mis à jour le : 14/09/2013