1874 |
30 juillet 1874
Prosper Guéranger à Alfred de Falloux
Le Mans, le 30 juillet 1874
Mon très cher ami,
La mort si regrettable de Mgr Fillion1 amène sans retard la question de son successeur, et vos souvenirs du passé vous expliqueront comment je me tourne vers vous dans la circonscription présente. Vous n'êtes plus ministre ; mais votre ami M. de Cumont est au ministère. Pensez donc un peu avec lui à cette pauvre Église du Mans, sœur de celle d'Angers, et donnez-nous un vrai pasteur.
Si quelque angevin nous était destiné, je crois que l'excellent abbé Bonpois continuerait dignement Mgr Fillion ; mais si vous désirez, mon cher ami, connaître un homme encore jeune, sûr et grave, qui ne se poussera jamais et ne sera jamais poussé, je pourrais vous l'indiquer et si j'avais une nomination à faire ce serait la mienne, car je lui reconnais toutes les qualités qui pourront faire un évêque sage et zélé. C'est M. l'abbé de Botreau (Charles Gustave) précédemment vicaire général de Mgr de Moulins2 dont il possède toute l'estime, et qui ayant du quitter ce poste pour raison de santé, occupe présentement l'importante cure des Herbiers, dans la Vendée. Je ne connais rien de plus digne que ce prêtre et de mieux taillé pour faire un évêque. M. du Botreau est né en 1832.
Il ignore la démarche que je fais auprès de vous, et en la faisant je n'ai d'autre but que de vous fournir l'occasion de faire du bien à notre Église veuve. Si M. de Cumont se décide à cette nomination, il se fera honneur ; car M. du Botreau jouit d'une véritable considération, et Dieu assurément récompensera celui qui aura rendu un tel service au diocèse du Mans.
La mort de notre cher prélat m'a bien vivement affecté. Je vieillis en mon coin, mais je n'oublie pas les anciens frères d'armes des jours anciens.
Recevez en pour vous l'assurance, mon cher ami, et croyez, je vous en prie, à mon vieil attachement.
fr. Prosper Guéranger, abbé de Solesmes.