CECI n'est pas EXECUTE 5 décembre 1881

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5 décembre 1881

Albert de Broglie à Alfred de Falloux

Cher ami, l'évêque1 ne se présente pas, mais s'il vous est possible venir sans trop d'inconvénients votre présence serait bien nécessaire pour empêcher l'entrée de M. Manuel au premier fauteuil2. M. Manuel assez brave homme et poète tolérable à deux inconvénients. Il est juif, et tout Israël est [mot illisible] ajouter ce fleuret à la couronne dorée qui ceint déjà son front. De plus il a été chef de cabinet de Jules Simon dans les mauvais jours de celui-ci, et devenu inspecteur général et membre du Conseil supérieur d'instruction publique, il a lâché son patron dans l'affaire des congrégations et voté toutes les criminalités professionnelles qu'on a voulues. C'est une voix  acquise au parti avancé de l'académie, marche pied de Deschanel3 voire même de Gambetta. Voyez si cette considération vous détermine : je ne parlerai de votre absence qu'au dernier moment. Bien à vous de cœur.

Broglie

Faites je vous prie mes meilleures amitiés à Cumont, ne le reverrez vous pas ?

Notes

1Mgr Perraud Adolphe Louis Albert (1828-1906), prélat. Prêtre de l'Oratoire de France en 1855, professeur d'histoire de l’Église à la Sorbonne en 1865, il fut nommé évêque d'Autun en 1874, puis cardinal en 1893.Normalien de la promotion About, Sarcey, Taine, Weiss, il fut l'auteur de  plusieurs ouvrages religieux, l'Histoire de l'Oratoire en France au XVIIIe et au XIXesiècle, de plusieurs études sur le cardinal de Richelieu, le Père Gratry, d'oraisons funèbres et de panégyriques. Il fut élu à l'Académie le 8 juin 1882 en remplacement d'Auguste Barbier qui avait exprimé, avant de mourir, le désir de l'avoir pour successeur, et reçu le 19 avril 1883 par Camille Rousset. Lorsque S. E. le cardinal Perraud arriva au conclave de 1903 qui suivit la mort du pape Léon XIII, le cardinal camerlingue le complimenta et le félicita d'appartenir à l'Académie française.
2Candidat à l'Académie française dés 1880, il ne sera jamais élu en dépit de ses nombreuses tentatives jusqu'en 1893.
3Deschanel, Émile Auguste Étienne Martin (1819-1904) auteur et homme politique. Professeur de rhétorique, il collabora à plusieurs revues dont la Revue des deux Mondes. Suite à la publication de l'un de ses articles, « Catholicisme et socialisme » (Liberté de penser), il fut suspendu de ses fonctions à l’École normale. Arrêté au 2 décembre 1851, il fut expulsé de France et se réfugia en Belgique. Bénéficiant de l'amnistie de 1859, il rentra en France, devenant le collaborateur du Journal des Débats, puis du National. Candidat sur une liste républicaine lors de l'élection partielle de la Seine du 2 juillet 1871, il échoua mais sera élu en 1876. Réélu en 1877, il siégeait parmi les républicains. Nommé sénateur inamovible le 23 juin 1881, il rejoignit la gauche républicaine.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «5 décembre 1881», correspondance-falloux [En ligne], BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Troisième République, 1881,mis à jour le : 07/04/2013