Année 1857 |
15 septembre 1857
Léonille Sayn-Wittgenstein à Alfred de Falloux
Sayn, le 15 septembre 1857
Les journaux m'avaient appris hier, ce que votre lettre, Monsieur le comte, est venu me confirmer aujourd'hui. Je m'y attendais certainement et cependant j'ai peine à me le persuader et j'ai taché de croire que les journaux donnaient une nouvelle1 mensongère. C'est aujourd'hui, ce matin seulement, que vos pieuses paroles ont mis dans mon cœur la conviction d'une des plus douloureuses privations qui puissent m'être imposées. Combien je regrette de ne pas avoir été à même de me joindre à vous, dans les derniers témoignages d'amour filial que vous lui avez si pieusement rendus. Oh ! Combien nous tous qui l'avons tant aimée devons vous remercier de la consolation que vos soins touchants et votre tendre affection lui ont procuré. Sa dernière lettre du 27 août, lettre pleine de sollicitude pour moi, et de vous pour ma fille, sera à jamais une relique précieuse que je conserverai dévotement avec celle que votre bonté, et votre juste compassion pour moi, m'ont destinée. Oui je suis à plaindre car j'avais bien besoin d'elle et si elle le savait déjà tandis qu'elle était sur cette terre, elle doit le savoir aujourd'hui du haut du ciel. Je la pleurerais toujours comme font les pauvres qu'elle a soulagés et les affligés dont elle savait si bien relever le courage et sécher les larmes. À mon retour à Paris cet hiver, j'espère vous retrouver, Monsieur le comte, il me semble que ce regret commun, ce deuil de nos cœurs doit nous rapprocher, resserrer encore davantage, et plus saintement; les liens d'une sympathie mutuelle, et qui de mon côté est déjà bien sincère et pleine d'admiration.
Pcesse Sayn-Wittgenstein
Mon mari devant se rendre à Paris le 1er octobre, je le chargerai de prendre à l'adresse que vous m'indiquez, le premier souvenir pour lequel je vous remercie encore et encore du fond du cœur.