CECI n'est pas EXECUTE 17 septembre 1860

Année 1860 |

17 septembre 1860

Alfred de Falloux à Charles de Montalembert

Augerville, 17 septembre 1860

Cher ami,

Voici le triste tribut d'un cœur demeuré froid, je l'espère, mais d'une tête bien appauvrie. J'ai supprimé par fatigue plusieurs idées qui auraient pu être utile, et vous me l'aviez promis d'avance, mais je me flatte de n'avoir au moins supprimé aucune vérité accusatrice. Je me suis imposé de ne me rien permettre pour la satisfaction, qui put compromettre Le Correspondant, mais je vous assure que j'y ai eu du mérite, car rien ne me fera moins de peine qu'un procès, si on veut bien me l'accorder.  Quant au bonheur de vous revoir, je suis tout à fait condamné à y renoncer. Je vais très probablement dans quelques instants me mettre au lit au lieu me mettre à table. Pour rien au monde je n'aurais voulu vous attirer ici, du moment où vous étiez mal disposé sur ma responsabilité et fort loin de tout secours médical. J'avais bien sincèrement l'intention de vous rejoindre pour peu que je me fusse senti le moindrement en force, mais je suis loin d'en être là, et quoique admirablement secondé par nos fermes amis, je vais certainement payer cet effort, quelque peu de chose qu'il ait produit. Charles de Lacombe sera à Paris mercredi, il vous portera tous les détails et toutes les pensées de ce lieu-ci. Je m'en repose donc sur lui près de vous, comme je me repose sur vous près du comité pour ne pas laisser prévaloir trop de prudence. Je la redoute surtout de l'imprimeur, et s'il exigeait une mutilation quelconque, je souhaiterais, si cela est possible, qu'il en fut fait mention en note. Et maintenant voici mon itinéraire, si la crise dans laquelle j'entre n'a que sa durée habituelle. Mercredi 19, je quitterai Augerville à 9 h. du matin pour aller prendre le chemin de fer à Étampes et coucher à Rochecotte, chez Mme de Castellane près Langeais, Indre-et-Loire. J'y passerai la journée du jeudi, 20, pour son fils dont je suis subrogé tuteur et des soucis de ma famille importants. En cas très urgent vous pourriez m'envoyer là qui vous voudriez par le chemin de fer. Le vendredi, je gagnerai Angers et samedi, le Bourg d'Iré où je ne saurai arriver plus tard sous peine de compromettre des intérêts très graves. À vous cher ami, du plus profond de l'âme.  

Alfred.

Charles de Lacombe veut bien se charger de la correction des épreuves. Veuillez en avertir M. Douhaire1 auquel j'écrirai de mon côté directement pour qu'il ne se [pique] pas.

Notes

1Douhaire, Pierre-Paul (1802-1889), catholique libéral bourguignon, apparenté à Théophile Foisset, il est alors secrétaire général du Correspondant où il assure notamment la chronique littéraire.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «17 septembre 1860», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, Année 1860, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES,mis à jour le : 04/04/2013