CECI n'est pas EXECUTE 18 avril 1872

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18 avril 1872

Alfred de Falloux à Couvreux (abbé)

Bourg d'Iré, 18 avril 1872

Cher Monsieur l'abbé,

Mon cœur a aussitôt prie la route d'Orléans en lisant les dernières paroles de Pie IX1 car c'est un premier rayon de justice et une bien légitime consolation après tant de tristesses, pour me servir du mot charitable et me montrer docile au conseil, en attendant l'exemple ! J'espère que M. de Corcelle2, encouragé, aura dit la vérité toute entière à Rome, que les députés signataires de la lettre vont recevoir les félicitations des collègues qui refusaient leur signature, et qu'un langage persévérant, imposant, va achever de faire comprendre à la nonciature et à l'archevêché de Paris qu'il est plus que temps de se mettre à l'œuvre pour réparer selon travail, qui a fourni tant d'esprits, tant de consciences, et qui nous a tous conduit sur ce bord de l'abîme où nous sommes encore suspendus !

Ma santé ne subit guère de variation, ni en mieux ni en pire ; je suis rentré au Bourg d'Iré depuis huit jours ; j'y serai rentré depuis trois semaines si votre évêque3 avait voulu regarder du côté de l'Anjou au lieu de chercher quelque ancien magistrat dans les Pyrénées. Est-ce qu'il y a maintenant deux Lacombe4 ? Je n'en connaissais qu'une, et c'était bien assez. Je voulais envoyer à l'évêché la nouvelle édition de Mme Swetchine5, et si vous vous êtes aperçus de sa non arrivée, je vous demande votre indulgence pour quelques semaines encore. Un malentendu retarde l'envoi des exemplaires qui m'étaient destinés, et me crée un tort apparent vis-à-vis des amis qui avaient tous les droits possibles au souvenir de Mme Swetchine comme au mien. Veuillez donc bien recevoir et faire agréer mon excuse provisoire.

J'espère un peu, sans trop m'en flatter, la visite de Mme de Montalembert6 et de Mme Cochin7 au Bourg d'Iré. Si cette espérance ne peut être réalisée, j'irai certainement les chercher là où elles seront, dans le courant de mai, et tout chemin fera passer par Versailles, bien entendu. Savez-vous si le duc d'Aumale sera reçu cette année à l'Académie et à quelle date8 ? Vous me feriez bien plaisir de me fixer là-dessus quand vous le pourrez, car il est probable que les mouvements de Mme de Montalembert en dépendront un peu. Mille vœux de revoir.

Alfred

Notes

1Dans un discours prononcé le 13 avril 1872, Pie IX, avait tenté de mettre un terme aux polémiques ouvertes à la suite du vote du 22 mars 1872 au cours duquel, Mgr Dupanloup, député du Loiret, n'avait pas protesté contre l'ajournement sur la question des pétitions déposées par plusieurs prélats en faveur d'une intervention du gouvernement français en vue de restaurer le pouvoir temporel du pape. Tout en invitant les catholiques libéraux à plus d'humilité, il reprocha aux intransigeants d'oublier « totalement les lois de la charité, et sans la charité on ne peut pas être vraiment catholique ».
2Corcelle est alors ambassadeur de France auprès du Saint-Siège.
3Mgr Dupanloup.
4Mgr Dupanloup séjournait régulièrement au château de La Combe de Lancey, à Villard-Bonnot, (Isère), propriété d'A. Du Boÿs, magistrat à la Cour de Grenoble.
5Il s'agit des deux volumes du livre de Falloux, Madame Swetchine, sa vie et ses œuvres (Paris Didier, 1872).
6Marie-Anne dite Anna de Montalembert (1818-1904), née de Mérode, mariée à Charles de Montalembert en 1836.
7Adeline Alexandrine Marie Cochin née Benoist d'Azy (1830-1892). Elle avait épousé Augustin Cochin, décédé le 15 mars 1872.
8Élu à l'Académie au siège de Montalembert le 30 décembre 1871, le duc d'Aumale sera reçu le 3 avril 1873.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «18 avril 1872», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, 1872, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES,mis à jour le : 09/04/2013