CECI n'est pas EXECUTE 10 mars 1859

Année 1859 |

10 mars 1859

Alfred de Falloux à Charles de Montalembert

10 mars 1859

Cher ami, vous savez peut-être déjà par Cochin que tout l'entrain de mon article a disparu à la nouvelle que Corcelle et Foisset étaient déjà à l'œuvre. Soyez sûrs qu'il vaut mieux pour notre cause que les représentants si divers du même pensée viennent chacun à leur tour et à leur façon donner leur son. Soyez sûrs aussi que vous me retrouverez plein de zèle si, comme cela est possible, il me reste encore après cela quelques compliments à présenter. Le courrier de ce matin ma porte une nouvelle inattendue, la retraite d'Achille Napoléon sous sa tante. C'est un coup de théâtre qui sera suivi de plusieurs autres, mais qui, pour le moment, va jeter l'incertitude dans beaucoup d'esprit qui se rapprochaient de nous. Je ne pense donc pas que je puisse perdre à attendre un peu. Vous avez déjà vu aussi, dans mon article du 25 février, l'inconvénient d'écrire sur de telles questions du fond d'une étable sans aucun renseignement ni documents spéciaux. Au mois d'avril, je serai à Paris. Enfin, cher ami, je reçois la nouvelle de l'arrivée du Pere Gagarin au Bourg d'Iré. Il déjeunera avec nous demain, et m'accorde, avant son départ pour l'Orient, huit ou dix jours uniquement consacrés à Madame Swetchine. Or, il m'est encore impossible, quoique me félicitant toujours des résultats d'Ussat1, de mener de front et de suite deux travaux pressés. Vous voyez, cher ami, à l'abondance de mes motifs, combien je me sentais moi-même tenté et combien je tiens à ce que vous ne soyez pas trop mécontent de moi. Ma femme est extrêmement sensible au moindre témoignage de votre souvenir. Elle est bien convaincue que vous hâterez ma fin de plusieurs années, mais je trouve qu'elle ne vous en veut pas assez pour cela et je ne puis réussir à entraver son attrait vers vous. Du moins n'abusez de cet aveu, je vous en prie, ni envers elle, ni envers moi.

Pendant que vous trouviez que je tendais la main à l'Univers, il trouvait que je lui montrais le poing et, en scrutant mon intention, je vous assure que celui qui est dans le vrai. L'évêque d'Arras2 ne s'y est pas trompé davantage en me félicitant et il déclare mon magnifique article entaché par mon injustice persévérante envers Veuillot. Je n'ai encore aucun écho de Rome. Vous l'aurez sans doute en même temps que moi et probablement plus sincère. Cependant je ne vous en demanderai rien, car je veux par-dessus tout ménagé cette bonne santé dans laquelle vous devez en conscience compter pour quelque chose l'ardente prière de vos amis. Soignez donc bien ce trésor qui vous appartient bien moins qu'à Saint-Benoît et à tous les saints du Correspondant. Mille et mille tendres remerciements chers ami. Mettez-moi au pied de Madame de Montalembert3. Combien je me réjouis que le double voyage de Mme de Meaux se soit arrangé ! Je crois que vous ne vous y intéressez guère plus que moi.

A. de F.

Notes

1Ussat-les-Bains, station thermale de l'Ariège où Falloux venait de séjourner plusieurs jours.
3Marie-Anne dite Anna de Montalembert (1818-1904), née de Mérode, mariée à Charles de Montalembert en 1836.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «10 mars 1859», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, Année 1859, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES,mis à jour le : 30/03/2013