CECI n'est pas EXECUTE 7 décembre 1871

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7 décembre 1871

Alfred de Falloux à Jules de Bertou

[Bourg d'Iré], 7 décembre 1871

Cher ami,

Mme de Castellane a écrit hier à Mme de Caradeuc1 quel profond chagrin elle éprouverait de votre départ, et nous nous sommes tous écriés que vous seriez vraiment coupable de persévérer dans cette pensée. Je lui ai aussitôt répondu dans ce sens, et je viens vous le répeter avec la plus entière sincérité. Quelque sensible que nous soit cette privation, elle nous le sera encore moins que la peine que nous connaîtrions et que nous causerions à Mme de Castellane, laissée dans un entier isolement, avec tant de circonstances aggravantes. N'obéissez donc qu'à votre propre cœur, qui vous tiendra le même langage que le nôtre, et soyez sûr que à la moindre question délicate intéressant Mme Swetchine, survenant, d'ici au second volume, qui ne peut commencer avant six semaines, je vous en avertirais et je vous consulterais aussitôt.

Je ne suis pas aussi mécontent que vous des torts que M. Thiers se donne vis à vis des princes ? Cela achève de mettre en lumière son pitoyable égoïsme et cela doit rapprocher plus d'un orléaniste de nos amis, parmi lesquels ils trouveront d'abord plus de désintéressement, et en outre, je l'espère, plus de fermeté. J'ai toujours espéré que les vacances et le séjour dans les départements donneraient meilleur conseil à nos représentants que le mirage de Versailles. Les premières nominations et la retouche forcée du message présidentiel me prouvent qu'il y a un retour d'énergie. Applaudissons-le, encourageons-le, et surtout, prions Dieu de le bénir.

Fitz-James2 est venu dîner avec nous hier, se rendant à Paris ; il est plus brisé en raison que jamais, cependant toujours affectueux, et, au fond plus éclairé sur M. le Cte de Chambord qu'il ne veut en convenir quand il est avec moi. Ne m'oubliez pas à Beaumont3, mais surtout, ne vous pressez pas d'aller à Tours par un temps aussi dur. La neige, qui nous avait épargné jusqu'ici, nous est arrivée hier, et elle avait bien l'air d'avoir passé par la Touraine4. Mille tendresses. Alfred

Je ne me souviens plus si je vous ai écrit que Louis de B[ourmont]5 était venu me conter son Lucerne6. Il a remis ma note en mains propres et, après l'avoir lue, on lui a répondu : si l'on connaissait mes motifs on aurait plus de confiance en moi. Alors pourquoi ne les dit-il pas ?

1Emilie-Marie-Charlotte de Caradeuc, née de Martel (1801-1882), mère de Marie de Falloux.

2Fitz-James, Édouard, Antoine, Sidoine de (1828-1906), propriétaire du château de la Lorie, près de Segré, en Maine-et-Loire, et donc voisin de Falloux auquel il était lié d'amitié.

3Les Falloux sont apparentés à la famille de Gustave de Beaumont, dont le château est à Beaumont-La Sarthe (Sarthe).

4Jules de Bertou est alors en Touraine, hôte de Mme de Castellane, au château de Rochecotte.

5Bourmont, Louis IV de Ghaisne de Bourmont (1801-1882).

6Résidence du comte de Chambord.mont


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «7 décembre 1871», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1871,mis à jour le : 15/09/2016