CECI n'est pas EXECUTE 21 septembre 1869

Année 1869 |

21 septembre 1869

Alfred de Falloux à Barthélémy Pocquet

Bourg d'Iré, 28 septembre 1869*

Je me promettais encore en quittant brusquement Caradeuc pour un impérieux rendez-vous, de regagner Vannes par Rennes et de mettre à votre disposition. Malheureusement pour moi, des circonstances indépendantes de ma volonté se sont obstinées à en décider autrement et je me vois tout à fait à l'état de banqueroute vis-à-vis de ceux qui s'étaient si aimablement imposés une excursion fatigante. Veuillez donc recevoir et partager avec eux mes tardifs remerciements et demeurer tous bien convaincus que ma reconnaissance n'a pas cessé de garder depuis un mois le caractère cuisant d'un remords.

Quant à la politique elle n'a pas cessé de marcher depuis notre séparation sans qu'on puisse préciser à quelle étape elle s'arrêtera. La maladie incontestablement grave de l'empereur1 rend plus opportun que jamais le régime représentatif et, à mon sens, rien de sérieux ni de légal ne peut se faire sans le changement préalable et radical de la loi électorale. Cette vérité est, je crois, de jour en jour mieux comprise et j'ose encore la recommander à votre persévérante énergie ainsi qu'à celle de tous les collaborateurs ou amis du Journal de Rennes. De quelle façon qu'on envisage le moment actuel, il ne peut être qu'une très rapide transition vers des événements beaucoup plus décisifs, et des élections d'une suprême importance ne peuvent manquer d'avoir lieu un peu plus tôt un peu plus tard.

M. de Kerdrel que j'ai été si heureux de revoir à Saint-Uhel2 m'a appris que M. l'archevêque3 n'avait point parlé, à la retraite ecclésiastique du Journal de Vitré4 et il considérait ce silence comme le sida certain de l'abandon du projet de La Borderie5. J'espère bien que ça conjecture est fondée et personne plus ardents que moi à s'en réjouir.veuillez agréer cette assurance, veuillez l'affaire agrée autour de vous et joindre également l'expression des regrets les plus sincères, les vœux les plus fidèles et du plus inaltérable dévouement.

Falloux

 

**Lettre publiée in B. A. Pocquet du Haut-Jussé, Correspondance politique de Barthélémy Pocquet, rédacteur du « Journal de Rennes » 1848-1878, Librairie Kliencksieck, Paris, 1976, p. 118-119.

1Napoléon III souffrait de la maladie de la pierre (un calcul dans la vessie).

2Situé sur la commune de Trefaven, le château de Saint-Uhel est la propriété de V. Audren de Kerdrel.

3Brossais Saint-Marc, Godefroy (1803-1878), prélat. Ordonné prêtre pour le diocèse de Rennes en 1831, il fut nommé évêque de cette ville par Louis-Philippe en 1841. Ardent orléaniste, il contribua néanmoins à l'attachement de ses diocésains à l'Empire ce qui lui valut de devenir le premier archevêque de Rennes. Il fut élevé au cardinalat par Pie IX lors du consistoire du 17 septembre 1875.

4Impérialiste sous l'Empire, le Journal de Vitré fondé en 1837 sera racheté, à la fin du XIXe siècle, par le Journal de Rennes.

5La Borderie, Arthur Le Moyne de (1821-1901), historien et homme politique, catholique et monarchiste, il est alors conseiller général de l'Ille-et-Vilaine. Il sera député de la circonscription de 1871 à 1876.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «21 septembre 1869», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1869,mis à jour le : 02/02/2015