CECI n'est pas EXECUTE 21 février 1873

1873 |

21 février 1873

Alfred de Falloux à Jules de Bertou

21 février 1873

Cher ami,

La grippe m’a de nouveau envahi, et je suis dans mon lit depuis deux jours, la toux déterminant une douleur de la tête qui exige l’oreiller. Pendant ce temps, votre dernière lettre arrivait à Mme de Caradeuc et je n’en étais que tardivement informé. Aujourd’hui, je reçois votre apologue de la poissarde, qui me prouve qu’il ne faut pas trop répondre sérieusement à la première partie de votre lettre. J’ai eu hier au soir la visite d’un député du centre droit arrivant de Versailles et c’est bien au retour de la princesse Clémentine1, très sèchement congédiée à Vienne au dernier moment, que la rupture est attribuée. L’Union, ce me semble, ne veut laisser aucun doute à personne là-dessus, et les deux articles que nous répétait hier au soir L’Union de l’ouest sont du pûr Veuillot. C’est par là que cela devait finir, et c’est à cela que, selon mon député d’hier au soir, il faut attribuer les derniers votes de la commission des Trente2. Il tenait tous les détails des principaux personnages et gémissait profondément, non du vote de la commission, mais des extravagances qui ont conduit à cette capitulation. Comme il est possesseur d’une très grande fortune, il aurait voulu confier les intérêts conservateurs à la monarchie et il n’en dit nullement comme L’Union : grâce à Dieu, et ses renseignements sont d’autant moins suspects qu’ils portent de la plus sincère tristesse. Votre poissarde parlera dont trop tard, et elle ne donnera le change qu’à ceux qui sont bien décidés d’avance.

Je vous envoie, par le même courrier, Le scepticisme politique, en vous remerciant d’y songer encore. Mme Swetchine a repris une marche active3, incompatible avec le bienfait d’une nourrice. Je préfère votre avis au mien pour le troisième volume, et je retire la princesse Galitzin4 du second pour la placer avec son petit-fils et le P. Gagarin, ce qui n’empêchera pas le second volume d’arriver aux environs de 580 pages. Mille tendres condoléances à l’abbé Couvreux et à la douce fatigue de Mme de Castellane.

Alfred


P.S. Voici ce qu’on m’apporte dans L’Etoile d’hier au soir : »Est-ce à M. le Cte de Paris que la Providence réserve la succession de Henry V ? Cela n’est pas démontré, Henry V peut lui survivre. Il peut survivre à tous les descendants actuels de Louis-Philippe. »

Connaissez-vous le cuisinier des d’Orléans ? Un pareil passage fait frémir, et si St Chéron l’adopte, il ne pourra plus se plaindre de Troppmaun5.

1Clémentine d’Orléans (1817-1907).

2Présidée par le légitimiste Roger de Larcy, la Commission des Trente créé le 28 novembre 1872 était chargée de rédiger une nouvelle constitution.

3Falloux est alors en train de travailler à la publication d’un ouvrage sur Sophie Swetchine.

4Maria Sergeievna, princesse Galitzin, née comtesse Sumarokova (1830-1892), mariée au prince Nicolai Galitzin en 1849.

5Jean-Baptiste Troppman (1849-1870). Auteur du meurtre de huit membres d’une même famille, il avait été guillotiné le 19 janvier 1870.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «21 février 1873», correspondance-falloux [En ligne], BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Troisième République, CORRESPONDANCES, 1873,mis à jour le : 19/12/2017