CECI n'est pas EXECUTE 19 octobre 1864

Année 1864 |

19 octobre 1864

Louis de Carné à Alfred de Falloux

Au Pérennou1, 19 octobre [1864]

Admirable, mon cher ami, admirable ! Vous n’avez jamais ni mieux pensé ni mieux écrit2. Voilà un grand service rendu avec une opportunité merveilleuse, car la dépêche est venue vous donner le diapason qu’on dira Célimène ? Quant à ce pauvre D. de Ch3. Bien plus compromis encore par la dépêche du 23 que par la convention du 154 c’est un éclatant exemple de la perversion générale que les mauvaises institutions exercent même sur les hommes les plus naturellement appelés à y résister. Quel argument en faveur de la responsabilité ministérielle !

Mon été s’est passé dans un labeur sérieux et aujourd’hui à peu près terminé. Je vous ramènerai fin de janvier La France et le Second Empire. Je prends le taureau par les cornes. Je suis assuré d’être juridiquement inattaquable, je veux dire administrativement. Pourtant, je le crois, je juge ce régime du ton dont je jugerais celui de François Ier.

Je serai à Paris le 15 novembre pour commencer l’impression de mon volume pour lequel je n’ai pas encore pris de dispositions ; j’entends peu parler de l’académie. Nous verrons plus tard. Montalembert rêve de Prévost-Paradol5 et du Père Gratry, trouvant Lavergne6 un peu terne et Autran7 plus terne encore. Je ne dis pas le contraire mais pourquoi l’avoir inventé. M. Guizot me boude paraît-il ? Car il ne m’écrit point. J’ignore pourquoi et je suis trop occupé pour être susceptible. Voici six mois que je marche sur des charbons ardents.

 

Adieu, mon cher ami. Je vous interdis absolument de me répondre, à conditions que vous veniez cet hiver nouveau à Paris.

Mes félicitations affectueuses. A vous de cœur.

L. de Carné

1Château du Pérennou, à Plomelin (Finistère), demeure de Louis de Carné.

2Il s’agit de l’article que Falloux s’apprêtait à publier dans Le Correspondant du 24 octobre 1864 pour protester contre La convention du 15 septembre. Voir note ci-dessous.

3?.

4Le 15 septembre 1864, une convention fut signée entre Napoléon III et Victor-Emmanuel. Par cette convention, la France s'engageait à abandonner, dans un délai de deux ans, la garde de la Papauté au roi d’Italie. Les catholiques craignaient qu’à l’issue de ce délai le territoire du pape soit envahi par les troupes de Victor-Emmanuel et qu’elle n’aboutisse à la disparition du pouvoir temporel du pape.

5Candidat à l’Académie au fauteuil de Jean-Jacques Ampère, il y sera élu contre Joseph Autran le 6 avril 1865.

6Lavergne, Léonce Louis Gabriel Guilhaud de (1809-1880), économiste, homme politique et homme de lettres. Après avoir entamé une carrière de rédacteur à la Revue du Midi et au Journal de Toulouse, il était entré au Conseil d’État (1842). Il ne sera jamais élu à l’Académie française. Élu du Gers de 1846 à 1848, il sera réélu député de la Creuse à l'Assemblée nationale en 1871, siégeant avec le centre-droit. Il sera nommé sénateur inamovible en 1875.

7Autran, Joseph (1813-1877), poète français. Plusieurs fois candidat à l’Académie française, il était soutenu par les catholiques, son ami V. de Laprade, Thiers et Mignet mais combattu par Guizot et les libéraux, le Journal des Débats et la Revue des Deux-Mondes. Contraint de se retirer devant Octave Feuillet en 1862, il ne sera élu que le 7 mai 1868, en même temps que Claude Bernard.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «19 octobre 1864», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1864,mis à jour le : 21/01/2019