1877 |
24 septembre 1877
Alfred de Falloux à Jules de Bertou
24 septembre 1877
Cher ami, votre bulletin ne nous satisfait pas du tout, et nous attendons avec impatience le résultat du nouveau traitement. S’il vous met en mesure de répondre aux vœux de Rochecotte, n’oubliez pas que Julien est toujours à votre disposition et que je vous l’expédierai là où vous voudrez, quand vous voudrez, en attendant que ce soit vous qui veniez le rejoindre ici. La purgation de Madame de Caradeuc1 lui a bien réussi : elle est allée hier, sans fatigue, à la grand-messe et aux vêpres. Mimi Lemanceau2 se marie, vous ne devineriez pas aisément avec qui : avec le neveu du curé de Segré. Quoique le mariage soit fort bon, M. Lemanceau hésitait depuis un an, mais la double inclination a été persistante et va avoir la bride sur le cou. M. Ségot3 a une très jolie et très douce figure et annonce à tous les points de vue, toutes les qualités d’un bon mari.
J’ai mesuré moi-même le cadre par en bas, et je l’ai trouvé, comme M. Aubin de 1,19 m, avec très peu de choses en moins. J’en ai conclu que M. Aubin ne s’était point trompé sur le reste et qu’on pouvait se reposer sur lui. Si vous revoyez M. Brunclair, veuillez lui répéter toutes les recommandations possibles pour que le duc de Bourgogne arrive chez Roze4 un vendredi, en même temps que Godivier et que la caisse le mette bien à l’abri de la pluie ou de la poussière, en ajoutant avec la plus parfaite sincérité que le voyage de M. Brunclair au Bourg d’Iré me causera un vrai plaisir.
Je ne sais si M. Lemarchand, ultra Univers et ultra Étoile est bien sincère dans ses vœux pour
M. Merlet5. Redemandez-lui le nom de cette oncle qui arrive si à propos pour mal faire. Je comprendrais sa prétention pour le conseil général et disant à son neveu : chacun sa part ! Mais avec si peu de centre-gauche qu’il y a à Baugé et avec tant d’affinité dans M. Merlet pour cette opinion même, comment cette intrigue pourrait-elle être sérieuse ? Et Angers ? De quel effet le Maréchal6 y a-t-il produit ? Tient-on ans maintenant Soland7 et Fairé8 pour sûrs de leur succès ? Dans tout l’arrondissement de Segré9, candidats et sous-préfets continuent à demeurer invisibles. C’est absolument une élection à pas de loup et je n’en ai jamais vu faire moins de bruit. Mais parlez-nous avant tout de l’arsenicate de soude.
Alfred
1Emilie-Marie-Charlotte de Caradeuc, née de Martel (1801-1882), mère de Marie de Falloux.
2Fille de Jean-Baptiste Lemanceau, le régisseur du domaine de Falloux.
3Futur époux de Mimi Lemanceau.
4Roze, Pierre-Gustave (1812-1883), militaire. Promu enseigne de vaisseau en 1837, il avait pris part à l'expédition du Mexique. Capitaine de vaisseau en 1856, contre-amiral en 1862, il sera nommé gouverneur de Cochinchine en 1865. Il avait quitté le service actif en 1877.
5Merlet, Jules Marie (1830-1921), avait été conseiller de préfecture sous l'Empire puis préfet du Maine-et-Loire après l'arrivée au pouvoir du duc de Broglie, du 21 juin 1873 au 22 juin 1876.
7Conseiller général du canton de Thouarcé (Maine-et-Loire), Théobald de Soland était un collaborateur de L'Union de l'Ouest.
Soland, Théobald de (1821-1906). Venu suivre les cours de droit à la Faculté de Paris, il s'était lié avec Augustin Cochin, puis avec A. de Falloux. Revenu en Anjou en 1851, il entra dans la magistrature, puis devint conseiller Cour d'appel d'Angers. Entré au Conseil général en 1870, il fut élu député le 5 mars 1876 et constamment réélu jusqu'en 1898. Il siégea avec la droite.
8Fairé, Alexandre (1824-1908), avocat et homme politique. Avocat au barreau d'Angers depuis 1848, il entra au conseil municipal d'Angers en 1870 avant de devenir l'adjoint du maire de la ville. Élu député en 1876, son élection sera invalidée. Réélu en 1877, il sera une nouvelle fois invalidé. Battu lors d'une élection partielle, il parviendra néanmoins à se faire élire en 1885. Resté en poste jusqu'en 1893, il siégeait à droite.
9Arrondissement du Maine-et-Loire.
