CECI n'est pas EXECUTE 22 janvier 1883

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22 janvier 1883

Alfred de Falloux à Pauline de Castellane

22 janvier 1883*

Chère Madame,

Soignez-vous ! Soignez-vous ! Et ne songez à aucune partie de plaisir, pas même à celle d’Angers, par un temps pareil.

Pour vous aider à prendre patience, je vais vous rendre compte de mon courrier de ce matin qui est particulièrement intéressant.

Avant tout, une lettre de la duchesse de Chevreuse1 qui me dit qu’elle résiste depuis longtemps aux aspirations de la chapelle de Madame Swetchine, mais qu’elle est vaincue par leur persistance, qu’elle me supplie de me convertir au drapeau blanc2 et que si je résiste à elle-même, je vienne prier dans sa chapelle à laquelle je ne résisterai certainement pas. Je vais lui répondre avec plus de reconnaissance que de foi.

Voici maintenant le texte même de M. Lavedan qui s’étonne de mes reproches sur son dernier article du Figaro et ajoute : « J’ai revu Camille3, dont je suis de plus en plus enchanté » il était favorable à Limoges4 pour Bordeaux5, mais j’ai bien peur que Limoges6 ne perde tout avec le cabinet Duclerc7. Le cardinal de Paris8 tient aussi un langage excellent ; mais pour des actes publics, c’est une autre affaire.

« Les deux volumes de l’abbé Lagrange9, allant jusqu’en 1865 paraîtront en mars. C’est décidé Camille a tout lu et approuvé. Il a demandé seulement une petite modification qui a été accordée sur le champ »

Les soulignés sont de Lavedan. Camille est le successeur de Wladimir10.

Les princes sont décidés à rester fort prudents et engagent leurs amis à l’être aussi.

 

*Archives nationales. Fonds Castellane.

1Julie Valentine de Contades, duchesse de Chevreuse (1824-1900), veuve d'Honoré d'Allbert de Luynes, duc de Chevreuse (1823-1854).

2Rappelons que Falloux bien que partisan d’une restauration, est résolument opposé au retour du drapeau blanc auquel la duchesse de Chevreuse demeure tout aussi résolument fidèle.

3Mgr Di Rende, Camille (1847-1897), qui venait de succéder à Mgr Czacki était beaucoup moins favorable aux catholiques libéraux que son prédécesseur.

4Pierre Lamazou (1828-1883), abbé. Vicaire de Saint-Sulpice, puis de la Madeleine, puis curé de Notre-Dame d'Auteuil. Proche des catholiques libéraux, ce fidèle de Mgr Dupanloup avait été nommé évêque de Limoges en janvier 1881. Il ne sera pas transféré à Bordeaux mais à Amiens.

5Suite au décès de Mgr Donnet, le 23 décembre 1882, le siège de Bordeaux était vacant. C’est en définitive François de la Bouillerie qui sera nommé archevêque de Bordeaux. Voir note infra.

Mgr Donnet, Ferdinand François Auguste (1795-1882), ordonné prêtre en 1819, il avait été sacré le 30 mai 1835 en qualité d’évêque de Rosa in partibus comme coadjuteur de l’évêque de Nancy et de Toul en 1835. Promu archevêque de Bordeaux le 30 novembre 1837 il sera nommé cardinal au titre de Santa Maria in Via au consistoire de 15 mars 1852.

6La Bouillerie, François, Roullet de (1810-1882). Évêque de Carcassonne depuis 1855, Mgr de La Bouillerie s'était lié à Falloux lors d'un voyage qu'ils avaient effectués ensemble en Allemagne, en Russie et en Pologne en 1836, soit deux ans avant qu'il ne se décide à entrer dans la prêtrise. L'entente entre les deux hommes s'étaient néanmoins détérioré progressivement et définitivement après 1848. Ne partageant pas le libéralisme catholique de Falloux, l'abbé deviendra un allié de L'Univers et du catholicisme intransigeant. Bouillerie François Roullet de la (1810-1882), ordonné prêtre en 1841, il exerça son première ministère au petit séminaire de Saint-Nicolas du Chardonnet dont Dupanloup était supérieur. Peu après il vint se mettre à la disposition de l'archevêque de Paris, Mgr Affre, qui en fit son vicaire général titulaire et le nomma archidiacre de Sainte-Geneviève. Il conserva sa place auprès de Mgr Sibour, le successeur de Mgr Affre à l'archevêché de Paris. Il fut nommé évêque de Carcassonne, le 6 février 1855. Le 16 décembre 1872, il deviendra coadjuteur du cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux, avec le titre d'archevêque de Perga. Ultramontain, il sera l'un des partisans les plus ardents du dogme de l'infaillibilité pontificale.

7Duclerc, Charles (1812-1888), homme politique. Élu par le département des Landes à l'Assemblée constituante de 1848, il entra dans le gouvernement provisoire comme sous-secrétaire d'état au ministère des Finances mais démissionna au bout de quelques semaines. Battu aux élections législatives de 1849 puis de nouveau lors d'une élection partielle du 11 mai 1851, il quitte peu après la France pour l'Espagne. Élu représentant des Basses-Pyrénées en 1871, il devint chef de la gauche républicaine. Devenu sénateur inamovible en 1876, il sera nommé ministre des Affaires étrangères et président du Conseil du 7 août 1882 au 28 janvier 1883.

8Mgr Guibert Joseph-Hyppolyte (1802-1886), archevêque de Paris depuis 1871, il avait été nommé cardinal par Pie IX en 1873. Il donnera sa bénédiction au mariage d'Anne de Mackau et du comte Humbert de Quinsonas célébré le 2 mai 1882 à l'église Saint-Philippe du Roule, à Paris.

9François Lagrange (1827-1895), secrétaire de Mgr Dupanloup; vicaire général d'Orléans en 1860, chanoine titulaire de Paris en 1880, évêque de Chartres en 1889. Il venait de publier une importante biographie de Mgr Dupanloup, Vie de Mgr Dupanloup, évêque d'Orléans, 3 vol., Paris, 1883-1884.

10Czacki adimir, Mgr (1835-1888). Nommé par Léon XIII à la nonciature de Paris, il fut chargé d'appliquer la nouvelle politique du Saint-Siège et en particulier de convaincre les catholiques de ne plus lier leur intérêts à la cause royaliste et d'accepter les nouvelles institutions que la France s'était données. Secrétaire de la Congrégation des Études de 1875 à 1877, secrétaire de la Congrégation des Affaires ecclésiastiques extraordinaires de 1877 à 1879, nonce à Paris en 1879, cardinal en 1882.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «22 janvier 1883», correspondance-falloux [En ligne], 1883, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Troisième République,mis à jour le : 29/12/2019