CECI n'est pas EXECUTE 10 février 1884

1884 |

10 février 1884

Alfred de Falloux à Pauline de Castellane

10 février 1884*

 

Chère Madame,

La campagne ridicule soutenue par des hommes ridicules et consistant à prouver par des faits aussi incontestés qu’incontestables de 1874 que M. le comte de Chambord n’avait pu tenir en 1851 un langage différent, a pris fin par la lettre de Lavedan, coupant nettement M. le comte de Chambord en deux, de la lettre à Barry1, à la lettre Veuillot. C’était l’histoire qui se laissait entrevoir et rien n’était plus amusant que le journal de Maurice d’Andigné2 hier jetant les hauts cris sur cette énormité. Ils en verraient bien d’autres s’il continuaient à provoquer les explications, mais ils s’en garderont bien et se contenteront de déclamer à outrance à côté du vrai. Naturellement les honnêtes gens se sont bien gardés de comprendre la portée de l’incident et d’en tirer parti. J’ai demandé à Lavedan ce qu’on lui en avait dit dans les bureaux de la rue de Varenne3 ou dans le cabinet de la rue de Solférino4. Il n’a pas répondu ce qui prouve du moins, qu’on ne l’a pas félicité. On n’en est toujours là, je le suppose, Aux coutumiers. A quoi bon ? Hélas à rétablir ma vérité sans laquelle on ne réussira jamais à rien ; à rétablir le parti conservateur dans la voix dont on l’a fait dévier et hors de laquelle il n’arrivera jamais au succès !

En attendant, vous avez dû lire dans votre Union de l’Ouest, d’hier l’article de l’abbé Lecoq, que naturellement La Défense5 a refusé d’insérer. Il est également inutile à la religion et à la monarchie de défendre le sens commun et les morts qui ont consacré leur vie à le défendre. L’Union de l’Ouest a profité du silence de La Défense pour se permettre quelques abréviations et corrections. Je souhaite que Rochecotte donne à Orléans l’exemple de n’en être pas mécontent. En attendant, je ne reçois pas de réponse au sujet de l’Espagne. Cela signifie sans doute qu’on a encore rien de précis à me dire. Pour peu que cela dure jusqu’aux environs du 21, j’irai voter rapidement, je reviendrai surveiller la correction des épreuves de Cochin6 qui doivent commencer demain, mais il est bien entendu que tant en allant qu’en revenant je m’arriverai à Rochecotte. C’est mon Alpha et mon Omega.

Voici votre lettre qui arrive avec les tendres injustices de Biche7 que j’attendais bien. Rien non plus de l’abbé Lagrange.

 

 

 

*Archives du Maine-et-Loire.

 

1Général Barry, fidèle du comte de Chambord avec lequel il entretint une correspondance suivie.

2D’Andigné, Maurice (1844-1926), ancien conseiller du Maine-et-Loire, légitimiste, il contestait les droits d’hérédité du comte de Paris au trône. Il dirige le Journal de Paris.

3Marie, duchesse de Galliera, née Brignole-Sale (1812-1888). Situé au 57 de la rue de Varenne, son hôtel tenait lieu de salon où se réunissaient les principaux leaders légitimistes et orléanistes, partisans pour la plupart de la «fusion». C'est aujourd'hui l’hôtel Matignon.

4Domicile d'Albert de Broglie.

5La Défense sociale et religieuse, journal créé en 1876 par Mgr Dupanloup.

6Falloux avait publié une biographie de son ami Augustin Cochin en 1875 (Augustin Cochin, Paris, Didier, 412 p.) , ouvrage qu’il venait de rééditer.

7Stanislas (1875-1959), dit « Biche », petit-fils de Pauline de Castellane.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «10 février 1884», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1884,mis à jour le : 23/01/2020