1881 |
25 juin 1881
Anne Apponyi à Alfred de Falloux
Lengyel1, 25 juin 1881
Bien cher ami, personne plus que moi ne peux comprendre toute l’étendue de votre chagrin2. Oui, c’est affreux de se retrouver seul après tant d’années de bonheur. Notre seule consolation est de pouvoir penser au passé sans y trouver le moindre souvenir pénible et bien peu de personnes hélas pourraient en dire autant nous sommes donc parmi les privilégiés.
Comme vous l’exprimez si bien, mes chers enfants sont en effet ma joie, mon occupation constante. Dieu veuille que vos prévisions s’accomplissent et que je jouisse encore du bonheur de mon cher Alexandre3 qui mérite d’être heureux. Il me semble qu’il devient tous les jours meilleur, ce cher enfant. Je suis bien charmé des nouvelles que le duc de Fitz James4 vous a données au sujet de ma chère Hélène5. Il est certain que sa nouvelle famille l’aime tous les ans davantage. J’attends cette chère enfant avec la plus vive impatience elle vient avec son excellent mari et ses quatre enfants pour passer une grande partie de l’été avec nous. Ai-je besoin de vous dire que cette arrivée me rend bien heureuse. Si vraiment vous réalisez votre projet de Rome vous y verrez ma fille et vous l’aimerez autant que son frère je n’en doute pas. Cela sera une vraie consolation pour moi de vous revoir. Je compte être à Rome si Dieu le permet en novembre.
Adieu cher ami.
Annette Apponyi
1Le château de Lengyel dans le comté de Tolna, en Hongrie, est la propriété de la famille Apponyi.
2Falloux venait de perdre sa fille Loyde (1842-1881) décédée le 2 juin.
3Alexander Apponyi von Nagy-Appony (1844-1925).
4Fitz-James, Édouard, Antoine, Sidoine de (1828-1906), propriétaire du château de la Lorie, près de Segré, en Maine-et-Loire, et donc voisin de Falloux auquel il était lié d'amitié.
5Hélène Apponyi, princesse de Borghese (1848-1914).
