Année 1861 |
27 novembre 1861
Prosper de Barante à Alfred de Falloux
27 novembre 1861
Monsieur et honoré confrère,
Je vous remercie d’avoir pensé à l’empressement que j’aurais à lire les lettres de Madame Swetchine surtout lorsqu’elles me venaient de vous1. J’ai souvent regretté d’avoir trop peu connu votre sainte et aimable amie. J’ai si peu habité Paris depuis trente ans que je n’ai point profité de l’accueil bienveillant qu’elle a eu la bonté de m’accorder lorsque je me suis présenté chez elle. On retrouve dans ses lettres le charme et l’édification de sa conversation. J’ai surtout pris plaisir à la correspondance avec Madame de Nesselrode2 et avec le père Gagarine, car je connaissais les relations de Madame Swetchine avec la Russie, plus que ses relations avec la société française. Au total cette publication est un recueil de pieuses justifications pour le tableau si vrai et si sincèrement ressemblant que vous nous aviez donné de sa vie, de son caractère.
J’adresse à tout hasard cette lettre en Anjou où je suppose que vous êtes absorbé sans doute par la perte cruelle que vient de subir la religion et l’amitié3. Ne serez-vous pas à Paris dans les premiers jours de février ? Nous comptons y recevoir à cette époque. Savez-vous quelque chose de l’académie ? Nous serons fort en peine pour les élections. Trouverons-nous une majorité assez courageuse pour choisir parmi les évêques le successeur du père Lacordaire ?
Vous connaissez Monsieur et honoré collègue mon sincère dévouement et ma haute considération.
Barante
1Falloux, Lettres de Mme Swetchine, 2 vols, Paris, Didier, 1861-1862.
2Maria Gureeva (1786-1849), épouse du comte Charles Robert de Nesselrode (1780-1862), diplomate russe. Elle avait entretenu une importante correspondance avec Mme Swetchine.
3Sans aucun doute le décès du P. Lacordaire le 21 novembre 1861.
