Année 1856 |
26 octobre 1856
Alfred de Falloux à Charles de Montalembert
26 octobre 1856
Mon cher confrère et ami,
Je vous sais un gré infini et votre constante sollicitude pour mes intérêts dans la triste affaire qu’on m’a suscitée. Mais je vous en prie, n’allez pas raviver vos névralgies pour une cause perdue. Mgr l’évêque d’Orléans1 et M. l’abbé Maret, avaient pensé que ma dernière lettre à Rome serait plus que suffisante. Il n’en a rien été, et M. le nonce2 me communique une réponse à laquelle j’étais loin de m’attendre, et qui me demande ce que je ne puis ni ne veux faire. Vous ne serez pas étonné que je ne sois pas plus clair, quand je vous dirais que le document n’a pas moins de 15 grandes feuilles. Plus j’accorde, plus on exige ! Aussi je suis fort peu tenté d’aller à Rome, et las de disputer notre réputation à des inimitiés aveugles et implacables. Je sais que l’évêque de Poitiers3 a dit à quelqu’un : M. Cousin et ses amis ont beau faire, ou il passera sous les fourches caudines ou il sera censuré. Et moi je puis répondre que M. Cousin ne passera pas sous les fourches caudines.
Ma gorge est toujours dans un état pitoyable et les brouillards qui commencent à s’annoncer ne me laissent guère l’espoir de vous faire la visite que j’avais projetée.
J’y renoncerais avec peine car je m’attache beaucoup à vous et désire bien vous serrer la main.
En ouvrant le Correspondant, j’y lis de vous des lignes bien habiles, mais qui, hélas ne seront point comprises !
2Nonce apostolique à Paris depuis 1853, Mgr Carlo Sacconi (1808-1889) fit remplacé en 1861 par Mgr Chigi Flavio qui demeurera à ce poste jusqu'en 1873. Mgr Chigi fut précédé d'une réputation de prudence et de tact, en même temps que d'aménité et de nobles manières. Pour certains observateurs français de l'époque, en particulier X. Marmier, il est dépourvu d'esprit et d'instruction.
