CECI n'est pas EXECUTE 4 novembre 1856

Année 1856 |

4 novembre 1856

Alfred de Falloux à Charles de Montalembert

Bourg d’I, 4 novembre 1856

 

Votre lettre m’arrive, cher ami, le lendemain du jour où je viens d’expédier le bon à tirer pour les notes. C’est à moi à en être éternellement désolé, car sous l’empire de la prudence romaine qui vous avait fait supprimer le paragraphe de ma préface, j’ai supprimé à mon tour, la lettre de Mgr Fioramonti1 et le commentaire dont je l’avais fait suivre. Vous m’aviez écrit de réserver complètement cette question, et j’ai craint d’aller, non seulement contre votre avis, mais aussi contre des données particulières qui pouvaient vous avoir guidé sans que vous eussiez jugé à propos ou de me les narrer tout du long par la poste.

Je vois maintenant que heureusement c’est tout le contraire qui vous arrivait, mais n’en parlons plus puisque c’est sans remède et pardonnez-moi en faveur de ma docilité. C’est toujours un sentiment à encourager même quand il tombe mal à propos.

Vous me faites grand plaisir en me disant que vous vous êtes un peu raccommodé avec ma chétive préface. Tout ce que je reçois de renseignements sur le camp ennemi me donne à penser qu’elle lui paraît le comble de l’insurrection et de l’audace et que pour la grande majorité de nos amis elle atteint pleinement le maximum de leur tempérament. Ce que je dis non pour ou la faire trouver meilleur, ma souffrance de ce moment-là me désintéressant presque de l’amour-propre d’auteur, mais pour que vous me disiez à votre tour quelle moyenne d’opinion vous avez recueillie.

Je fais bien des vœux pour que le prince de Broglie se décide à répondre à dom Guéranger et, avec sa large et haute manière, démontre bien à toute cette école qu’elle veut tout discuter, tout mettre à la charge de Dieu parce que cela la met elle-même à l’aise pour se passer du sens commun et de tout ce qui s’y rattache.

Il m’est impossible de songer à vous rejoindre à Paris, cher ami, mais je suis bien heureux d’y connaître votre présence pour un moment si opportun. Vous aurez vu par ma dernière lettre, écrite comme la vôtre le jour de la Toussaint, combien je crois urgent que vous mettiez l’œil et la main dans le plan de campagne de cette grosse affaire. J’ai écrit à Orléans dans le même sens et sollicite encore de l’évêque quelques jours au Bourg d’Iré sans toutefois manifester aucune inquiétude pour ce qui pourrait conserver personnellement vous et moi et sans risquer une phrase qui ne puisse impunément passer par tous les secrétaires de l’évêché.

Je vais demander à Fontaine2 qu’il vous envoie plusieurs exemplaires de la seconde édition dont une serait pour M. Michel, dont j’ignore l’adresse et même le titre de journal. Je tâcherai aussi que dans l’Ouest nos journaux amis prêtent aux notes la publicité qui leur aura manqué par ailleurs. Mallac3 est du nombre de ceux qui ont fort gémi de la violence de ma préface mais l’abbé Sisson4 ? Nous dira-t-il encore qu’il a peur de se compromettre ? Je n’ai rien demandé à Henri de Riancey et je le plains plus que je ne m’en plains.

 

Mille et mille tendresses

Alfred

1Mgr Fioramonti, secrétaire des Lettres Latines auprès de Pie IX, avait écrit une lettre à Louis Veuillot témoignant de l’appui du Saint-Siège à la ligne politique de L’Univers renforçant dés lors la position de Louis Veuillot au sein de l’Église de France.

2Secrétaire de Falloux.

3Mallac, Eloi Jacques (1810-1876), maître des requêtes au Conseil d’État, chef de cabinet de plusieurs ministères sous la monarchie de Juillet, il était devenu par la suite préfet, de la Nièvre, puis de l'Hérault.

Il est alors directeur de L'Assemblée nationale, journal « fusionniste ».

4Sisson (1825-1910), prêtre. Ordonné en 1849, il fut professeur au petit séminaire de Strasbourg, puis au séminaire de St-Esprit à Paris. En 1854, il devint rédacteur puis directeur de L'Ami de la Religion, journal religieux de tendance légitimiste créé sous la Révolution. Le journal avait été réorganisé en mars 1859 pour devenir un quotidien de grand format. Curé d'Antony (1862-1875), puis de St Honoré d'Eylau (1875-1889).


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «4 novembre 1856», correspondance-falloux [En ligne], Année 1852-1870, Second Empire, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1856,mis à jour le : 22/03/2021