CECI n'est pas EXECUTE 23 février 1880

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23 février 1880

Maxime du Camp à Alfred de Falloux

Paris 62, rue de Rome, 23 février 1880

Monsieur le comte,

D’après le calcul fait chez M. de Broglie, je devais obtenir 13 voix au premier tour, en ne comptant pas celle de MM. Laprade1 et Ollivier2 qui sont absents. Or, d’après un mot qui m’a été dit aujourd’hui par Camille Doucet3, j’ai cru comprendre que Feuillet4 voterait pour Labiche5 et M. Mamnier6 que j’ai rencontré, m’a prévenu que lui aussi donnerait sa voix à Célimare le bien-aimé7 ; M. Marmier a ajouté que, selon lui, les voix devraient se porter sur celui des candidats, Labiche ou moi, qui réunirait d’abord le plus de suffrages. J’en ai onze, ce qui me met en minorité sur Labiche, qui en a treize et il faut lui compter John Lemoine8 qui a déjà commandé ses porteurs, afin de le faire transvaser à l’académie.

La bienveillance dont vous m’honorez m’engage à vous avertir de ces incidents dont votre sagesse pourra parer le péril que je signale également à MM. Dumas9 et Caro10.

Agréez, je vous prie Monsieur le comte, l’expression de mes sentiments les plus respectueusement dévoués.

Maxime du Camp

 

1Laprade, Victor Richard de (1812-1883), poète et littérateur. Il fut nommé professeur de littérature à la faculté des lettres de Lyon en 1848. De sentiment légitimiste et catholique libéral, il collabora au Correspondant et fut élu à l’Académie française le 11 février 1858. En 1861, suite à la publication, par le Correspondant, de ses Muses d’État, Laprade fut révoqué en tant que fonctionnaire et la revue reçut un avertissement.

2Émile Ollivier (1825-1913), homme politique. Fils d’un Carbonaro républicain, il fut nommé par le gouvernement provisoire préfet de Marseille, le 27 février 1848; il avait alors 22 ans. Il se fit élire en 1857 au Corps Législatif. Républicain, il était néanmoins dépourvu de tout sectarisme. Il accueillit avec faveur l’orientation du régime vers le libéralisme, approuvant notamment le décret du 24 novembre 1860. Réélu en 1863, il fut appelé par l’Empereur pour diriger le gouvernement du 2 janvier 1870 .Exilé en Italie jusqu'en 1873, battu dans le Var en 1876 et en 1877, il consacra le reste de sa vie à la rédaction des dix-sept volumes de son Empire libéral. Il avait été élu à l'Académie française le 7 avril 1870.

3Doucet, Camille (1812-1895), directeur général de l’administration des théâtres, élu à l’Académie française le 7 avril 1865, il sera nommé secrétaire perpétuel en 1876.

4Feuillet, Octave (1821-1890), romancier et auteur dramatique. Il fut le premier élu à l'Académie à titre de romancier, le 20 janvier 1862.

5Labiche, Eugène Marin (1815-1888), dramaturge et célèbre auteur de vaudevilles, il sera élu à l'Académie française, le même jour que M. du Camp, au fauteuil de Sylvestre de Sacy.

6Marmier, Xavier (1808-1892), journaliste et écrivain. Rédacteur en chef de la Revue germanique, puis administrateur général de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, il propagea en France la langue et la littérature allemandes. Il avait donné des leçons de littérature aux deux filles de Louis-Philippe, Clémentine et Marie. Il collabora également à la Revue des Deux Mondes. Il fut élu à l’Académie française le 19 mai 1870. On lui doit un Journal (1848-1890) important qui fut publié en 1968 (Droz, 812 p.).

7Célimare le bien-aimé est une comédie-vaudeville en 3 actes d'Eugène Labiche et Alfred Delacour, représentée pour la 1re fois à Paris le 27 février 1863.

8Lemoine, John (1815-1892), diplomate, journaliste et homme politique. Collaborateur puis rédacteur en chef du Journal des Débats, il écrivit également pour la Revue des Deux Mondes, lui fournissant plusieurs travaux sur la politique, des études sur l'Angleterre et des études biographiques. Entré à l'Académie française en 1875, il sera élu sénateur inamovible en 1880.

9Dumas Jean-Baptiste (1801-1884), chimiste et homme politique. Membre de la Législative en 1849, ministre de l'Agriculture et du commerce en 1851, il deviendra sénateur en 1852. Candidat à l'Académie française, il ne sera élu qu'en 1875, au siège de François Guizot.

10Caro Elme Marie (1826-1887), professeur de philosophie. Disciple de V. Cousin, il publia plusieurs ouvrages de philosophie spiritualiste et fut élu contre H. Taine à l'Académie française le 29 janvier 1874 en remplacement de Ludovic Vitet.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «23 février 1880», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1880,mis à jour le : 08/05/2021