CECI n'est pas EXECUTE 23 novembre 1881

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23 novembre 1881

Camille Doucet à Alfred de Falloux

Paris, le 23 novembre 1881

Monsieur le comte, cher et honoré confrère,

Mon embarras est extrême !

Placé au milieu de toutes les candidatures et questionné par tous les candidats, je veux bien répondre de mon mieux à la confiance qu’on me témoigne ; mais je ne saurais accepter des responsabilités trop lourdes.

Mgr d’Autun1 m’a fait l’honneur de m’écrire il y a huit jours et m’a envoyé une lettre officielle posant sa candidature ; mais, en même temps, il m’a demandé quelques renseignements que je me suis hâté de lui donner et auxquels semblait soumise la lecture de sa première lettre à l’académie et la notification officielle de sa candidature.

Je me proposais donc de lire cette lettre à la séance de demain, s’il y avait lieu.

Pendant ces huit jours de retard, les amis du prélat avaient le temps de se concerter et de prendre à partie.

J’ai vu les uns, j’ai écrit aux autres ; enfin j’ai fait de mon mieux.

Malheureusement plusieurs d’entre eux sont loin de Paris ; vous surtout qui auriez pu agir si utilement dans la circonstance. Les uns attachent une importance très sérieuse à la personne de celui qui recevra l’évêque s’il est élu, et vont jusqu’à en faire une condition sine qua non, ainsi que j’ai eu l’honneur de vous l’écrire.

D’autres en prennent volontiers leur parti et n’y voient pas un grand inconvénients. Vous êtes de ce nombre. En attendant, le temps passe et nous n’avons plus que deux jeudis avant l’élection de demain et de demain en huit.

Je viens de recevoir ce matin une lettre de Mgr d’Autun. Il me dit que, dans l’incertitude du succés il me prie de tenir pour non avenue et détruire sa lettre officielle du 13 novembre.

Il ajoute, par Post Scriptum, qu’il quitte Rome et qu’il sera rentré dans son diocèse vendredi ou samedi.

Je me hâte de vous en informer.

Je ne parlerai pas de sa candidature à l’académie demain. Mais je le détruirai pas sa lettre, qui à la rigueur, pourrait être lu le demain en huit.

Cela donne encore huit jours.

S’il venait à Paris, si vous y veniez vous-même la partie pourrait encore être gagnée.

Je n’y pousse pas ; je ne garantis rien, mais je laisse aux plus habiles et aux plus compétents la direction et la responsabilité d’une affaire que je me reprocherais d’entraver en quoi que ce soit.

À vous de tout cœur et très respectueusement.

Camille Doucet.

1Mgr Perraud Adolphe Louis Albert (1828-1906), prélat. Prêtre de l'Oratoire de France en 1855, professeur d'histoire de l’Église à la Sorbonne en 1865, il fut nommé évêque d'Autun en 1874, puis cardinal en 1893.Normalien de la promotion About, Sarcey, Taine, Weiss, il fut l'auteur de plusieurs ouvrages religieux, l'Histoire de l'Oratoire en France au XVIIIe et au XIXesiècle, de plusieurs études sur le cardinal de Richelieu, le Père Gratry, d'oraisons funèbres et de panégyriques. Il fut élu à l'Académie le 8 juin 1882 en remplacement d'Auguste Barbier qui avait exprimé, avant de mourir, le désir de l'avoir pour successeur, et reçu le 19 avril 1883 par Camille Rousset. Lorsque S. E. le cardinal Perraud arriva au conclave de 1903 qui suivit la mort du pape Léon XIII, le cardinal camerlingue le complimenta et le félicita d'appartenir à l'Académie française.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «23 novembre 1881», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1881,mis à jour le : 15/05/2021