CECI n'est pas EXECUTE 22 juillet 1866

Année 1866 |

22 juillet 1866

Fr. Hyacinthe à Alfred de Falloux

Passy (Paris), ce 22 juillet 1866

Monsieur le comte,

Je me demande comment j’ai pu attendre près de deux mois avant de répondre à une lettre comme celle que vous m’avez fait l’honneur, et j’allais presque dire l’amitié de m’écrire. J’arrive d’un long voyage dans le Midi, qui a été une série d’occupations et de fatigues, plus qu’un temps de repos, mais qui, heureusement, s’est terminée par une retraite spirituelle aux environs de Nice. Nous avons là, dans une gorge de montagne et tout près de la mer, un couvent qui rappelle les anciens déserts monastiques. J’ai cherché ces renseignements austères, et doux pourtant, que Saint-Bernard nous dit avoir moins trouvé dans les livres des hommes que parmi les rochers et dans les bois. Aujourd’hui, me voici de retour à Paris, où j’ai une solitude aussi, et où je vais me livrer d’ici à l’hiver non plus au repos mystique, mais au travail scientifique que nécessite la préparation de nos conférences.

Le souvenir de mon trop rapide passage au Bourg d’Iré, et votre bonne et pressante invitation, m’attireraient bien de votre côté ; mais je suis impérieusement retenu, après tant d’absences, d’une part par la proximité des bibliothèques et de l’autre par la garde de notre petit couvent qui va m’être confié de compagnie [sic] seulement avec un autre religieux. Force m’est donc d’attendre que de meilleures circonstances me permette de reprendre un chemin qui m’est connu maintenant, et que je ne puis plus oublier. Je souhaite que d’ici là, la santé vous soit pleinement rendue. Votre lettre me parlait de souffrances plus grandes que de coutume. Soignez-vous, et gardez vos forces du corps au service des forces de l’âme pour ces luttes de la tribune auxquelles nous prépare votre beau manifeste électoral ; et, dans tout état de choses, pour ses combats plus généraux et plus continus de la vérité et de la justice, où, quoique vous en disiez, un homme comme vous n’est jamais ni désarmé, ni vaincu.

J’ai eu le bonheur d’embrasser Monsieur de Montalembert qui va mieux1, quoique encore bien souffrant. Ce sera long surtout, et les médecins parlent de cinq mois ! Je ne cesse de m’unir à vous et à tous ses amis pour demander la santé de ce grand serviteur de l’Église, que j’aimais avant de le connaître et dont le nom et les livres se mêlent aux émotions les plus intimes et les plus profondes de ma première jeunesse.

Veuillez agréer, Monsieur le comte, l’expression des sentiments de haute estime et de respectueuse sympathie dans lesquels je demeure votre très humble et dévoué serviteur.

Fr. Hyacinthe de l’Imm. Conc.

 

1Montalembert est alors atteint de la maladie de la pierre.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «22 juillet 1866», correspondance-falloux [En ligne], Année 1866, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Année 1852-1870, Second Empire,mis à jour le : 25/08/2022