CECI n'est pas EXECUTE 13 juin 1861

Année 1861 |

13 juin 1861

Alfred de Falloux à Jules de Bertou

13 juin 1861

Cher ami,

Vous avez du recevoir une lettre de Mme Caradeuc au moment même où vous en réclamiez une de M. Giraud1 et je viens ce matin vous donner moi-même mon bulletin. Il est satisfaisant si l'on ne tient compte que du mal lui-même, arrêté dans sa marche progressive et dont on me promet la retraite complète d'ici à 10 ou 12 jours. Cela veut dire tout le mois de juin. Dans cet hypothèse je sacrifie l'Anjou et je me rendrai directement d'ici à Royat2. Le jury agricole pour le prix de ferme inspecte le Bourg d'Iré aujourd'hui même et je me suis fait représenter par une expression de regret que vous garantiriez j'en suis sur, cher ami, comme bien sincère.

Je suis en instance depuis hier avec L'Ami de la Religion pour qu'il sèche ses larmes à l'égard de Cavour3 et ne transforme pas un premier mouvement de générosité fort louable en une polémique prolongée et un jugement politique qui seraient absurdes. Les Lacombe4 sont tout à fait de mon avis mais il paraît que l'abbé Lamazou5 a enfourché ce dada avec une ardeur extraordinaire. S[aint]t Chéron6 est venu me voir hier en annonçant que la reconnaissance du royaume d'Italie par la France serait sous très peu de jours au Moniteur7 et vous envoyant mille tendresses.

Rien de nouveau sur nos débats intimes dans la question électorale. M. de S[ain]t Priest est venu me voir en revenant de Noisiel8 et n'avait rien gagné. Ma lettre à M. le comte de Chambord est parti le lendemain de mon retour du Marais9. J'en ai donné communication au duc de Lévis qui m'en a accusé réception en termes très courts très froids mais très polis. Mettez-moi bien aux pieds de Mme votre mère, cher ami, et continuez à nous en donner des nouvelles le plus souvent possible. Vous avez du voir que votre article nécrologique avait été inséré avec une réclamation. Vous aurez les lettres de Mme Swetchine à Melun dans le nouveau Correspondant10 et dans la Revue des deux mondes d'après demain, l'article d'Albert du Broglie11.

A vous de tout cœur.                                                            Alfred

Notes

1Secrétaire de Falloux.
2Station thermale du Puy-de-Dôme où Falloux se rendit à plusieurs reprises pour soigner sa névralgie.
3Camillo Benso, comte de Cavour (1810-1861), homme politique italien. Entré à l’Académie militaire de Turin à l’âge de dix ans, il en sortit en 1826 avec le grade de sous-lieutenant dans le corps royal du génie. Envoyé en poste à Gènes en 1830, il accueillit avec enthousiasme la révolution de Juillet. Ses idées jacobines et les soupçons qui pesaient sur son appartenance au carbonarisme lui valurent d’être transféré dans la vallée d'Aoste, véritable exil. Démissionnaire de l’armée, il séjourna à partir de 1833 chez son oncle, à Genève. Partisan du libre échange, il rédigea divers ouvrages sur cette question et effectua plusieurs voyages en Europe.  Premier ministre et ministre des finances du Piémont et d’Italie (1852-1861).
4Il s'agit des deux frères Mercier de Lacombe, Hilaire (1831-1908) et Charles (1832-1904). Tous deux étaient historiens et publicistes, collaborant notamment à L’Ami de la Religion.
5Pierre Lamazou (1828-1883), abbé. Vicaire de Saint-Sulpice, puis de la Madeleine, puis curé de Notre-Dame d'Auteuil.
6Alexandre Guyard de Saint-Chéron (1808-1892), journaliste. Ardent défenseur des principes monarchiques, il est le correspondant du comte de Chambord.  
7Le Moniteur universel, journal officiel.
8Demeure du duc de Lévis, en Seine-et-Marne.
9Le 3 juin 1861, Falloux avait adressé au comte de Chambord une longue lettre pour tenter de le convaincre de revenir sur sa consigne d'abstention électorale. En vain, le 17 juin, le comte de Chambord lui répondait qu'il entendait bien maintenir sa ligne de conduite. Voir ces lettres dans Mémoires d'un royaliste, Paris, Perrin, 1926, t. 3, p. 113 et ss.  
10Au cours de l'année 1854, et pour contrer les positions de L'Univers entièrement acquis au pouvoir, Montalembert et plusieurs autres catholiques libéraux au premier rang desquels furent associés Cochin, Falloux, A. de Broglie et Foisset décidèrent de prendre la direction du Correspondant, une revue catholique fondée en mars 1829. Le premier numéro émanant de la nouvelle direction parut au cours du mois d'octobre 1855.
11Sous le titre, Une âme chrétienne dans la vie du monde, A. de Broglie avait consacré un long compte rendu sur le livre de Falloux, Madame Swetchine, sa vie et ses œuvres.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «13 juin 1861», correspondance-falloux [En ligne], Année 1861, Année 1852-1870, Second Empire, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES,mis à jour le : 12/08/2012