1880 |
17 juin 1880
Alfred de Falloux à Imbert Goulbeyre
17 juin 1880
Réponse Docteur Imbert Goulbeyre
Cher Monsieur le Docteur,
Je ne vous accusais point, parce que je ne me croyais aucun droit à vos félicitations, mais je vous accuse très sévèrement pour avoir accueilli et pour m’avoir répété une odieuse calomnie contre M. de Montalembert ; il était l’homme du monde le plus incapable d’un pareil trait. Celui qui vous l’a raconté est bien facile à reconnaître ; il n’a jamais été comme il s’en vante un ange consolateur ; il a été toute sa vie un démon diffamatoire et a fait ce triste métier durant quarante ans. Dans ce long espace de temps, il a souvent changé de parti, mais il n’a jamais changé de caractère. Veuillez lui dire de ma part qu’il a bien perdu sa peine en ce qui me concerne. Je crois qu’il l’a bien perdue aussi près du public. Montalembert et l’évêque d’Orléans1 resteront dans l’histoire de notre temps deux grandes âmes et deux grands serviteurs de l’Église. Les hommes, qui ont, durant tant d’années, dépensé tant de venin contre eux, en seront pour le châtiment auquel, grâce à Dieu, échappent bien rarement les hommes qui ont mis persévéramment les plus mauvais procédés au service des plus mauvaises intentions.
J’ai bien peur qu’on ne vous ait pas mieux renseigné sur l’évêque actuel de Nantes2 que sur M. de Montalembert, mais j’y apporte moins d’intérêt.
Si Marie Julie est vraiment honorée des faveurs divines, je suis tout prêt à la vénérer ; si c’est une farceuse elle me paraît assez inoffensive ; elle n’écrit point de journaux ; elle ne vend point les intérêts de l’Église au plus offrant, et je ne vois aucun motif pour combattre en vous un culte qui pourra peut-être tôt ou tard vous amener au Bourg d’Iré.
Veuillez agréer, cher Monsieur le docteur, avec le vœu, l’hommage de mes reconnaissants et très vieux sentiments.
2Jules-François Le Coq (1821-1892), évêque de Luçon puis de Nantes depuis 1877. En 1885, il sera nommé évêque puis nonce à Bruxelles.
