Année 1853 |
30 mai 1853
Francisque Corcelle à Alfred de Falloux
30 mai 1853
Rességuier vous dira, mon cher ami, les raisons qui m’ont contraint d’ajourner un des plus vifs plaisirs que je puisse imaginer, après tant d’épreuves et une si longue séparation, celui de me retrousser avec vous en pleine intimité. Je songe maintenant à combien cette visite avec celle que je dois en Touraine au pauvre Alexis [de Tocqueville] toujours bien souffreteux. Les lettres indépendamment de leur insuffisance, ont d’autres inconvénients qui vous expliquent ma taciturnité. Ajoutez y l’espoir d’une longue et prochaine causerie.
Plus que jamais j’ai foi dans votre âme et vos appréciations sur le fond des choses. Peut-être avons nous différé sur quelques détails de conduite sur les points essentiels nous nous entendrons parfaitement.
Rességuier vous dira encore mon impression sur les chances d’une affaire qui n’a pas cessé de me préoccuper. Cela se passe un peu comme au jeu de l’oie renouvelé des Grecs. Tantôt l’on avance et tantôt l’on recule selon la rencontre des oisons ou des puits. Je vous prie de croire que l’analogie cesse dans l’idée que je me fais de l’oiseau à couronner.
Le cheval de Troie est un autre jeu renouvelé des Grecs. Je ne le condamne pas trop, avec les réserves que vous y mettez assurément et pourvu que les guerriers cachés dans ses entrailles restent en bon état après leur sortie de cette machine.
Ah ! Que j’envie notre ami de pouvoir vous parler bientôt sans paraboles. Il ne vous exprimera jamais assez combien je vous sais fidèlement et tendrement attachés.
Fr. C.
Mes compliments à votre bœuf1….Imples omnia animal beneictine.
1Falloux gagnait souvent des prix agricoles avec les bœufs de son domaine du Bourg d’Iré.
