CECI n'est pas EXECUTE 24 mai 1852

Année 1852 |

24 mai 1852

Henri de Riancey à Alfred de Falloux

Lundi 24 mai 1852

Cher et illustre ami,

M. de Bertou vous a dit sans doute tout mon regret de n'avoir pu vous joindre pendant votre court séjour à Paris et surtout celui que j'ai éprouvé que vous aviez pris la peine de passer rue de Bellechasse1, sans que j'y fusse. Je voulais causer avec vous de mon adjonction aux propriétaires de l'Union, de la part que je prenais à sa collaboration et à sa direction. Je n'avais nul besoin de vous dire dans quel esprit j'y étais entré : vous le savez. Je tiens trop aux doctrines de conciliation, d'union, dont vous êtes le premier et le meilleur défenseur, pour y essayer autre chose qu'un rôle analogue et dans l'humble sphère de mes efforts. Hélas ! Comment serions-nous divisés et comment ne renoncerions-nous pas à tout sentiment d'exclusion, de rivalités, de lutte intestine, quand notre concorde est à la fois et le seul salut de notre parti et le seul salut de la France ! C'est une tâche difficile que de prêcher cette doctrine et on risque souvent de prêcher dans le désert. Je veux cependant l'essayer, quelque déboire qu'on y trouve, et si je n'y parviens pas, je n'accuserai que ma maladresse et mon insuffisance, non la doctrine que je crois meilleure et plus nécessaire que jamais. Vous voyez de quels écueils nous sommes entourés et votre indulgence me tiendra compte des mille difficultés qui semblent l'apanage de notre cause :<expression latine illisible>. Au-dehors des combats sans liberté, sans égalité : au-dedans... Vous en savez plus que moi là-dessus. Je sais votre horreur pour les démentis et rectifications : aussi suis-je à cent lieux de vous demander rien qui ressemble à cela. Mais il est bon que vous sachiez comme le gouvernement fait dire ou laisse dire des sottises calomnieuses à votre égard. Voici donc - mille pardons de cet envoi - quatre lignes du Bulletin de Paris2. L'Union de l'Ouest ne pourrait-elle pas dire simplement que vous êtes chez vous depuis près d'un mois ? Ce serait la meilleure réponse. Que dites-vous de tout ce que nous voyons ? J'espère contre toute espérance. De plus, il me semble que voici la période critique qui approche, celle où dans le calme plat, le pouvoir n'a plus qu'à agir et qu'à se faire regarder. La France est muette et l'Europe attentive. Nous sommes à ce lendemain de la victoire, bien autrement difficile que le soir de la lutte et du coup d'état. Comment en sortirons nous ? Dieu est grand !

Adieu, mon bien cher ami, offrez je vous prie les plus humbles hommages à Mme de Falloux et croyez à mon plus sincère et cordial attachement.

  1. Henry de Riancey

Notes

1Domicile d'Henri de Riancey.
2Joint à cette lettre d'H. De Riancey, le texte du Bulletin de Paris, organe bonapartiste soupçonnait en effet Falloux de se compromettre avec lé régime: « Nous apprenons avec plaisir que M. le vicomte de Falloux, fait en ce moment des démarches pour se rapprocher du gouvernement. Les éloges qu'il prodigue à l'énergique résolution du prince dans les salons qu'il fréquente, font présager sa participation prochaine au mouvement des affaires. Le sentiment qu'il a de sa propre valeur, lui permet d'exprimer ce désir. »

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «24 mai 1852», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, Année 1852, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES,mis à jour le : 21/12/2011