Année 1861 |
20 avril 1861
Pierre-Antoine Berryer à Alfred de Falloux
Samedi 20 avril 1861
Mon bien cher ami, votre lettre n'a qu'un tort, elle ne me dit rien de votre santé et j'ai bien plus à cœur d'en avoir des nouvelles, et de bonnes nouvelles, que d'être mis au courant des autres affaires de ce monde, pourtant je me réjouis de la défaite des sudistes impériaux au sein de l'Académie1. Je désire vivement que même échec fut subi par Henri Martin2 emphatique dénigreur de l'histoire de notre pays ; je ne manquerai pas de faire tous mes efforts pour vous aller seconder à la séance de jeudi prochain. Je prends ici tout le repos qu'il est possible de trouver en ce temps où trop d'affaires sérieuses fatiguent l'esprit et le cœur. Les douleurs de ce vilain zona me tiennent toujours, l'irritation générale est calmée, je tousse peu, mais il m'est survenu dans la zone attaquée une glande qui me fait souffrir. J'espère la faire dissoudre en me préservant du froid et peut être n'aboutira-t-elle pas <mot illisible> qui d'ailleurs mettrait toute fin à l'éruption. Si le temps ne se refroidit pas trop, comptez donc sur moi pour jeudi prochain, j'arriverais facilement à Paris pour l'heure de la séance sauf à revenir à mon gîte dans la soirée. On me dit que MM. Empis3 et Lebrun4 sont malades. Soignez-vous, cher ami.
Je vois par l'Ami de la religion que la quasi-saisie de la lettre de Montalembert5 a été levée, on me parle beaucoup des jugements divers ou plutôt des impressions et même des exclamations que suscite la lettre de M. le duc d'Aumale6. Je ne m'arrête pas à un passage sur 1830 que j'en voudrais retrancher, ni à un regret de quelques paroles que j'aurais voulu y rencontrer, mais à mon avis l'écrit est excellent, habile et portant rude atteinte à l'établissement impérial. Je voudrais bien savoir ce qu'il y a de vrai dans les récits que l'on me fait d'un cartel, ou projet de cartel ; on joint à ces bruits-là un compte rendu de paroles échangées entre <mot illisible> et leur cousin7. Que savez-vous de ces causeries, et surtout de l'effet populaire de la lettre dans Paris. En somme, je n'ai exprimé qu'un chagrin sur cette publication, j'ai écrit que j'enviais aux cadets8 l'honneur d'avoir si vigoureusement répondu aux injures adressées à toute la famille. Au revoir, mon cher ami, à savoir je l'espère. Charles de Lacombe me fait espérer sa visite. Je désire bien qu'il vous ai vu avant de me venir.
Mille amitiés.
Berryer