CECI n'est pas EXECUTE 6 août 1870

Année 1870 |

6 août 1870

Alfred de Falloux à Charles de Lacombe

Paris, 6 août 1870,

Cher Monsieur,

J'ai eu depuis votre départ une foule d'ennuis auquel je n'ai pu me soustraire, qu'en faisant comme vous, et en allant passer quinze jours au bord de la mer. Le jour où j'ai reçu votre lettre, je recevais de M. le duc de Noailles une convocation chez Du Teil pour hier ; je n'ai pas voulu vous répondre avant de savoir si on y déciderait quelque chose. Comme toujours il a fallu discuter, puis discuter encore des choses bien simples : je ne sais si l'on finira par prendre une décision. Andral et Du Teil sont arrêtés par les scrupules et les appréhensions de ce bon président qu'aucune assurance de ces Messieurs ne peut calmer.

Il aurait désiré me faire recommencer une partie du travail, et c'est là ce qui avait motivé ma fuite. Je lui ai déclaré hier que je continuais ce que j'avais commencé et que, sur vos indications, je retouche aurai ce qu'il y aurait à compléter ou à arranger, quand tout serait fini. Andral m'annonce ce matin que cela ne l'a pas satisfait et qu'il veut avoir avec moi une nouvelle conférence lundi prochain. En vérité, c'est décourageant. Notez qu'on a décidé, en principe, qu'on ne livrerait rien à l'éditeur avant la fin de la guerre (ce qui peut être long) et que le traité avec Didier1 est modifié en ce sens. Quelle urgence y a-t-il donc à faire, pour les premières années, un travail de révision et de correction qui, à mon avis, est tout à fait votre domaine.

Aussi je résiste et je résisterai jusqu'au bout. Je vais achever 1845 lundi et mardi et je vous enverrai à la fin de la semaine prochaine les années 1841 à 1846. Je ferai en sorte d'arriver à 1850 pour le 1er septembre. Si vous pouvez faire un voyage à Paris à cette époque, bien des difficultés seront levées.

Ne croyez pas à l'enthousiasme de Paris : les circonstances seules imposent à la presse censée un silence de convenance. Mais les révoltes de la garde mobile sont l'expression vraie du sentiment démocratique de Paris. En dehors de la démocratie, on trouve dans nos sphères beaucoup de tristesse ; on ressent vivement l'humiliation que nous font subir le gouvernement et la diplomatie. La défaite de Wissembourg2 annoncée aujourd'hui n'est pas faite pour relever le moral. Cependant Monsieur le comte de Chambord va, dit-on, publier une lettre pleine de vœux pour le succès de nos armes3.

Si j'ai quelques nouvelles mardi je vous en ferai part en vous envoyant mon travail. Croyez, cher Monsieur, à mes sentiments bien dévoués.

A. de Falloux

Notes

1Eugène-Ferdinand Didier, auteur et éditeur.
2Le 4 août 1870, la division du général Douay avait été anéantie par l’offensive prussienne lancée sur Wissembourg.
3Suite aux graves défaites des armées françaises dans la guerre contre la Prusse, le comte de Chambord décida de quitte Frohsdorf dans l'intention de s'enrôler. Le 1er septembre 1870, il lança un appel à « repousser l'invasion, sauver à tout prix l'honneur de la France, l'intégrité de son territoire"

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «6 août 1870», correspondance-falloux [En ligne], BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Second Empire, Année 1852-1870, Année 1870,mis à jour le : 05/04/2013