1884 |
12 octobre 1884
Guibert (Mgr) à Alfred de Falloux
Bordeaux, le 12 octobre 1884
Monsieur le Comte,
J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser, avec le n° du journal de L'Union de l'Ouest. Veuillez en recevoir l'expression de ma vive gratitude. L'indignation que m'a causée la lecture du misérable pamphlet Maynard1 m'a forcé d'écrire ma Lettre circulaire et je suis loin de m'en repentir, car je ne puis voir traîner dans la boue un des premiers évêques2 de notre siècle sans protester. Je veux espérer, comme vous, que d'autres le feront à leur tour. Je suis convaincu que la grande majorité de mes collègues dans l'épiscopat pensent comme moi, mais malheureusement beaucoup trop n'ont pas le courage d'affronter une certaine presse et ont peur aussi d'une partie de leur clergé tristement endoctriné par elle. Je ne puis croire cependant que l'affaire en reste là. Mon initiative me paraît avoir un tel retentissement qu'il est impossible que l'épiscopat reste muet, et je trouve qu'il est grand temps qu'il parle. Notre grand malheur, à mon avis, c'est que dans le passé, il n'a pas assez parlé. Depuis une trentaine d'années, ce n'est pas lui qui gouverne l’Église de France ce sont des journalistes qui veulent gouverner et gouvernent trop l’Église et les Évêques. Il y aura un terme à ce désordre, mais avant de l'atteindre nous passerons par de cruelles calamités. Veuillez, Monsieur le Comte, agréer l'expression de ma vive reconnaissance, celle de mon sentiment le plus respectueux et le plus dévoué.