CECI n'est pas EXECUTE 24 septembre 1856

Année 1856 |

24 septembre 1856

Henri Lacordaire à Alfred de Falloux

Sorèze1, 24 septembre 1856

Monsieur et honorable ami,

Je revenais de Bourges lorsque votre lettre du 19 septembre m'a été remise. Elle m'a causé à la fois du plaisir et du chagrin, le plaisir d'avoir directement de vos nouvelles et le chagrin d'être si éloigné,  par le temps, les lieux et les circonstances, de l'acte de présence que vous réclamez de moi. Depuis deux ans, vous le savez, j'ai renoncé à la chaire, et je passe ma vie dans une école au milieu des soins multiples et incessants que réclame l'éducation de la jeunesse. Sortir de ma solitude est en soi un grand sacrifice ; mais je le ferais cependant pour vous si j'en avais la moindre possibilité.

Vous me prenez à la veille d'une rentrée, au travers d'une rentrée, au travers de la discussion d'un règlement général, des visites des parents et des étrangers. J'ai fait quatre cent lieues, aller et retour, pour prendre possession du petit séminaire de Bourges, et je n'y ai passé que vingt-quatre heures. Vous voyez par là où j'en suis de mon pauvre temps. Je vous serai donc bien reconnaissant de m'excuser et de croire à tous mes regrets. Dieu seul sait quand nous nous reverrons, si ce n'est dans le Correspondant où j'ai lu les belles pages2 que que vous avez consacrées à énoncer les seules doctrines que je crois utiles à la défense de l’Église dans les temps modernes...

J'espère, Monsieur et honorable ami, que vous ne m'en voudrez pas de ma résistance à vos désirs ; car je n'y suis pas libre, et je puis vous assurer que j'eusse été très heureux, surtout dans les circonstances présentes, de vous donner une preuve de ma haute et cordiale estime.

Veuillez du moins en agréer l'expression, ainsi que l'hommage de mes sentiments respectueux pour Mme de Falloux, à qui je vous prie de les présenter.

Fr. Henri-Dominique Lacordaire, des Fr. Prêch.

*Lettre publiée dans Le Correspondant du 10 juin 1911.

Notes

1Depuis le 27 juin 1854, le P. Lacordaire s'est vu confier la direction du collège de Sorèze, dans le Tarn.
2Falloux venait de publier, en deux parties « Le parti catholique, ce qu'il a été, ce qu'il est devenu » (Le Correspondant, avril et mai 1856). Très flatteur à l'égard de Montalembert, véritable défenseur à ses yeux des intérêts de l’Église, l'article de Falloux s'en prenait vivement au « despotisme » de L'Univers et à son illustre rédacteur, L. Veuillot.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «24 septembre 1856», correspondance-falloux [En ligne], BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1856, Second Empire, Année 1852-1870,mis à jour le : 12/11/2013