CECI n'est pas EXECUTE 18 octobre 1882

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18 octobre 1882

Charles de Mazade à Alfred de Falloux

Paris, 18 octobre 1882

Monsieur le Comte

Je ne suis rentré du Midi que ces jours derniers, à la veille du 15. Je me proposais de vous écrire quand je reçois votre lettre à laquelle je me hâte de répondre. Je n'ai pas eu encore le temps de me mettre au courant de ce qui se passe dans notre maison de la Revue1 mais j'en sais assez pour rassurer dés aujourd'hui sur les intentions. Soyez certain qu'il n'y a rien de changé. Le retard tient uniquement à la saison, aux séjours à la campagne corses et distractions qui ne sont pas toujours favorables au travail. Il n'y a rien de plus, ni influences d'aucune sorte, ni indifférence. Comptez que pour ma part je mettrai tout mon zèle à me tenir informé pour vous et à hâter le travail. Vous êtes de ceux dont les œuvres ont trop de prix pour qu'on ne tienne pas à leur faire la place qu'elles méritent. J'ai toute confiance dans le talent de M. Leroy-Beaulieu2 et si je suis fâché de n'être pas en ce moment à sa place, c'est qu'il y a plaisir à traiter des plus chères et des plus sérieuses affaires du pays avec un homme comme vous. J'ai bien regretté moi-même d'être privé de l'honneur de vous recevoir ou de vous aller faire ma visite chez Mr. de Pérignon3. Vous auriez trouvé à [mot illisible] dans ce coin de Gascogne un morceau de Bretagne qui me tient au cœur. Nous étions en réunion de famille. Tous les miens auraient été heureux de se joindre à moi pour vous faire prendre en bon gré une hospitalité de village dont la simplicité eut été compensée par le bon vouloir. Vous m'avez dit dans une lettre que vous mettiez en réserve la généreuse pensée de reprendre votre conversation dans le Gers une autre année, et moi je me réserve de vous rappeler cette bonne pensée. Je suis rentré ici avec des préoccupations [mot illisible] au sujet de nos affaires. Jamais, je crois, elles n'ont été dans de plus malhabiles mains, non, pas même quand les mains étaient criminelles. A coup sûr, je ne désespère pas de la France, mais si j'en avais le pouvoir,, je dirai à tous les hommes de bonne volonté que le moment est venu de se mettre à l’œuvre, de choisir leur terrain, de commencer par ce qui est possible. J'ai pu connaître dans nos contrées qu'il s'est fait déjà beaucoup de mal mais qu'il y a aussi une vraie lassitude, un grand doute sur tout ce qui se passe, un mouvement d'arrêt, si vous me passez le mot. C'est peut-être assez pour ne pas désespérer, ce n'est pas assez pour remettre le bien à la place du mal. Je n'ai pu voir encore personne pour l'académie. J'ai su seulement qu'on paraissait admettre comme naturelle et indiquée la combinaison des deux candidatures pour les deux élections simultanées. J'espère que de loin comme de près vous voudrez bien me conserver votre bienveillance auprès de vos amis et de M. le secrétaire perpétuel4.

Laissez-moi vous  renouveler, Monsieur le Comte, l'assurance de mon affectueux dévouement.

Ch. de Mazade.

Notes

1Revue des Deux Mondes.
2Leroy-Beaulieu, Anatole (1842-1912), enseignant et historien. Enseignant à l’École Libre de Sciences Politiques, il collaborait à la Revue des Deux Mondes et au Journal des Débats, où il avait sans doute été chargé d'un compte-rendu de l'ouvrage de Falloux (Discours et mélanges politiques). Il sera l'auteur de Les catholique libéraux: l’Église et le libéralisme de 1830 à nos jours,  Paris, Plon&Nourrit, 1885, 298 p.
3Falloux était allé rejoindre Albert de Rességuier, son fidèle ami, qui séjournait au château de Périgon, Geneviève de Rességuier (1840-1889), sa fille aînée ayant épousé Dieudonné Henri Marie de Pérignon (1840-1889).
4Sans doute Camille Doucet, alors secrétaire perpétuel.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «18 octobre 1882», correspondance-falloux [En ligne], BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Troisième République, 1882,mis à jour le : 07/04/2013