CECI n'est pas EXECUTE 13 août 1872

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13 août 1872

Alfred de Falloux à Jules de Bertou

Caradeuc, 13 août 1872

Cher ami, M. Riobé1 vous a écrit pendant que j'étais dans mon lit, et hier, en en sortant, j'écrivais à l'abbé Couvreux que j'ai eu la maladresse d'adresser à Orléans. Je pense qu'elles le rejoindront à Rochecotte, et lui répéteront ce que Albert [de Rességuier] avec directement écrit à l'évêque2 avant de quitter Versailles, c'est que les exemplaires sont en dépôt chez Mme Max Récamier3 chez qui Albert [de Rességuier] logeait, et qui devait profiter d'une occasion pour les envoyer au destinataire. Je suppose donc que les volumes4 arriveront à Orléans au premier jour s'ils n'y sont déjà rendus. Si je les tenais, je n'hésiterais pas à les expédier par la poste ; mais c'est un déboursé de six ou sept francs que je ne puis imposer à Mme Récamier, que je n'ai jamais vue.

Je suppose donc que le mieux est de laisser passer tranquillement les suites de ce malentendu, jusqu'à ce que l'occasion attendue se présente. En attendant, je remercie beaucoup ceux qui ont prêté Madame Swetchine à Georges et à Betka5, parce que je suis très sensible à leur suffrage. C'est un grand triomphe pour Madame Swetchine que de savoir pénétrer de si jeunes cœurs, et c'est un honneur aussi pour ces jeunes cœurs, et c'est un honneur aussi pour ces jeunes cœurs, de se montrer si intelligents. J'ai donc là une double joie, et c'est une grande rareté dans un temps qui ne rapporte guère que de doubles de triples chagrins.

Je viens de recevoir une très grande lettre de Charles de Lacombe datée du Mont-Dore6 ; il dit, à peu de choses près, les mêmes choses que Albert, c'est qu'il est bien difficile aux honnêtes gens renverser un gouvernement sans être d'accord sur son remplaçant. Il y a selon moi plusieurs réponses à faire ; mais il faut que ses réponses rallient quatre cents voix et il y en a toujours une centaine plus à droite ou une centaine plus à gauche qui condamne le reste à l'impuissance. Chacun à sa façon répétant le même refrain, je me rejette alors sur la loi électorale, et je demande ce qui empêcherait d'apporter dans cette réforme de la prévoyance, de l'énergie et de l'ensemble. On me répondra là-dessus hiver prochain ; mais si la réponse n'est pas préparée pendant les vacances, on subira encore le travail tout fait de Monsieur Thiers, pétri d'illusions et de calculs personnels. Parce Domine, ne in oeternum irascaris nobis7 !

Marie est toujours souffrante, Mme de Caradeuc se plaignait avant d'hier, elle était mieux hier ; Albert nous reste jusqu'à l'Assomption et nous quittera par le courrier du soir.

Les Candé8 nous ont donné 24 heures et ont fort instamment recommandé qu'on transmît leurs hommages à Rochecotte. Ils nous ont débrouillé l'affaire Nicolaï, que nous avions embrouillés en supposant que puisque le duc de Penthièvre abordait cette maison, c'était pour y chercher une demoiselle. On nous a rappelé que Roger de Nicolaï devait épouser Mademoiselle de Beauvau, et que c'était ce pauvre futur là que le duc de Penthièvre allait supplanter. Y sommes-nous cette fois ? Dites à Georges, avec les plus tendres remerciements pour sa seconde lettre que je lui porterai un exemplaire de Mme Swetchine à Rochecotte, et à sa tante de Castellane que je vous rapporterai très précieusement Monsieur Thiers ou vous le renverrai si je me vois trop en retard. Maintenant qu'elle sait combien je suis sensible aux préférences qu'elle accorde à autrui. Avez-vous rendu justice au duc de Noailles ?

Alfred.

Le soleil nous est revenu depuis deux jours.

Notes

1P. Riobé, secrétaire de Falloux.
3Gabrielle Récamier, née de Roquefeuil-Cahuzac (1838-1898), épouse de Maximilien Récamier (1835-1924), capitaine puis général.
4Il s'agit des deux volumes du livre de Falloux, Madame Swetchine, sa vie et ses œuvres (Paris Didier, 1872).
5Surnom de Marie Radziwill, qui a comme deuxième prénom Élisabeth.
6Station thermale du Puy-de-Dôme.
7Seigneur, pardonnez à votre peuple,ne soyez pas toujours irrité contre nous.
8Sans doute les Brillet de Candé demeurant sur la commune de Noyant-la-Gravoyère (Maine-et-Loire), située non loin du Bourg d'Iré.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «13 août 1872», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, 1872, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES,mis à jour le : 09/04/2013