1871 |
8 novembre 1871
Alfred de Falloux à Jules de Bertou
Bourg d'Iré, 8 novembre 1871
Cher ami, je suis pris d'un très gros rhume depuis deux jours, et j'ai encore très grande peine ce matin à vous dicter quatre lignes.
J'ai vu, dans le Français, que Laurentie tempêtait contre la pensée de l'abdication du comte de Chambord et Galitzin m'écrivait que dix députés dont il n'indiquait ni les noms ni la couleur, étaient partis pour solliciter du prince cet acte d'abnégation patriotique. J'ai envoyé chercher L'union à la Douve1, et j'ai vu qu'elle s'en prend surtout au Courrier de la Gironde2 ; ce serait donc l'ancienne intrigue de Rochecotte qui poursuivrait son but, et le duc Decaze3 qui reprendrait sa marche. En savez-vous davantage de votre côté ?
L'étoile (journal de Quatrebarbes4) devait paraître avant-hier ; il s'est ajourné de huit jours.Je crois que plus ils avancent, plus ils sentent les mauvais côtés et les difficultés de leur œuvre ; mais ils se sont engagés en Belgique et un petit nombre fait passer cette considération par-dessus toute autre. Si j'en juge par le curé du Bourg d'Iré, le clergé ne mord point à ce nouvel hameçon, qui leur est présenté ici par la main de Mme de Lortange et de Mme de la Salmonière, ne passant point toutes deux pour des têtes fort judicieuses. L'évêque5 se tient à l'écart jusqu'à présent.
J'ai réfléchi plus à mon aise, dans le silence forcé de mon rhume, que dans le mouvement d'Angers très animé par la présence des députés et des conseillers généraux, et j'ai retourné dans tous les sens le projet Naville6. Je ne voudrais me prononcer ni absolument contre, comme Cumont, ni absolument pour, comme Gaillard avant d'avoir lu le volume, que je vous demanderai tout de suite en arrivant à Rochecotte ; Mais en attendant, je suis frappé de plusieurs dangers dans vos lettres ne s'occupent et sur lesquels je vous interrogerais, si j'avais plus de force. Ce sera pour le vive voix.
Je me mets au pied et au coût de tout ceux qui, autour de vous, voudront bien le permettre.
Alfred.