1883 |
7 avril 1883
Henri Francotte à Alfred de Falloux
Liège1, 7 avril 1883
Monsieur le comte,
Je serai trop heureux, si j'avais pu réellement, comme vous me le faites espérer, parler de votre livre2 d'une façon digne de lui et digne de vous.
Votre bienveillance veut bien me rassurer un peu ; mais il me reste cependant le sentiment d'être demeuré fort en dessous de ma tâche.
Heureusement pour moi, les catholiques belges vous connaissent3, vous lisent et vous aiment depuis longtemps et chacun aura pu suppléer à mon insuffisance.
Les malheureuses désunions qui avaient existé parmi nous ont, grâce à Dieu, disparu. L'infortune nous a rapproché. Personne, dans l'épreuve pénible que nous traversons, ne songe à ranimer ces déplorables querelles dont Monsieur Perrin et quelques journalistes s'étaient faits les champions les plus en vue. De part et d'autre, il y avait eu des torts. Aujourd'hui tout est oublié ; la constitution et ses libertés apparaissent à tous comme notre dernier boulevard.
Combien de temps résistera-t-il aux assauts furieux qu'on lui livre ? Dieu le sait ; mais je crois difficile que sur notre sol libre et chrétien depuis tant de siècles, le despotisme jacobin ait grandes chances de s'implanter.
Recevez, Monsieur le comte, l'expression de ma profonde reconnaissance pour le témoignage de bienveillance que vous m'avez accordé : il constitue pour moi la plus haute récompense que je pouvais ambitionner.
Veuillez croire mon respectueux dévouement.
Henri Francotte4
1Ville de Belgique.
2Sans doute s'agit-il de Discours et mélanges politiques, Paris, E. Plon, 1882.
3Falloux s'était rendu en compagnie de Montalembert au Congrès des catholiques à Malines, en Belgique. Le 3 septembre 1867, il avait prononcé un important discours sur la situation en Italie.
4Henri Francotte (1856-1918), membre de l'Académie Royale de Belgique (1913), historien et auteur de livres et d'articles sur les encyclopédistes et la Grèce ancienne.
