1873 |
22 juin 1873
Alfred de Falloux à François Poujoulat
Bourg d'Iré, 22 juin 1873
Mon cher ami,
Si vous ne me demandiez que mon vote1, je vous répondrai que, depuis nombre d'années, il vous est acquis sans réserves et sans commentaires ; mais vous faites, en outre, à l'appel à ma franchise, avant de vous décider à poser votre candidature2. Ceci me place sur un terrain plus délicat.
Vous n'êtes pas seulement l'auteur de vos ouvrages, vous êtes aussi le collaborateur de L'Union. Tout le monde aura-t-il remarqué comme moi votre silence en plusieurs occasions ? Tout le monde l'aura-t-il jugé suffisant. Je serais porté à répondre dans le sens le plus favorable, et j'y serais porté notamment pour le duc de Broglie, l'un des plus récemment injuriés ; cependant il ne faudrait peut-être pas que M. Laurentie appliquât de nouveau toute son ardeur à vous desservir, et pour quiconque lit L'Union, il est évident que M. Laurentie n'a jamais pardonné ni à ceux qui étaient entrés à l'Académie ni à ceux qui voulaient y entrer. Le courrier même de ce matin, qui m'apporte votre lettre, m'apporte aussi un petit entrefilet dédaigneux dans lequel L'Union fait cause commune avec L'Univers sur le terrain de l'Académie, comme elle a coutume de le faire désormais sur le terrain et sur le ton de la polémique.
Je dois donc, mon cher ami, pour répondre franchement à votre appel, me résumer en un oui formel pour ce qui me concerne personnellement, en un oui plus réservé en ce qui concerne un assez grand nombre d'académiciens, si M. Laurentie et quelques-uns de ses collaborateurs demeurent obstinément les ennemis de votre candidature.
Votre bien dévoué,
A. de Falloux
1Voir lettre de F. Poujoulat du 21 juin 1873.
2F. Poujoulat renoncera en défintive à se porter candidat à l'Académie française.