Année 1863 |
Mai 1863
Lucien-Anatole Prévost-Paradol à Alfred de Falloux
Paris, Dimanche [mai 1863]
Monsieur,
Je suis bien touché de votre lettre de l'offre si cordiale de votre appui à Périgueux1. Je n'ai pas besoin de dire que je vous répondrai avec une entière franchise. Je n'ai aucun parti pris sur la question romaine, et ici même j'ai refusé formellement de prendre aucun engagement. On voulait me faire promettre de signer l'amendement des Cinq2 pour l'évacuation. J'ai refusé ; de même que je ne m'engage nullement à voter pour la continuation de l'occupation de Rome. En un mot, je me sens incliné à m'abstenir dans la chambre (si j'y suis) sur la question romaine ; non par politique, je vous l'assure, mais parce qu'à moins d'accepter d'une majorité d'électeurs un mandat impératif sur une question semblable, on n'a pas le droit de trancher au nom de la France. À mes yeux les élections se font sur la question intérieure et si elle se faisait sur la question romaine, je ne m'y présenterais point. Je ne demande donc que les voix des électeurs disposés à donner le premier pas à la question intérieure et à laisser à leur représentant sa liberté d'action sur la question romaine ; liberté dont je n'abuserai guère, car je suis d'avis de réserver la question sois à un plébiscite, soit à une chambre investie d'un mandat spécial sur ce point. Agréer l'expression de ma vive gratitude et de mon entier attachement.
1Prévost-Paradol est alors candidat à l'élection au Corps législatif.
2Il s'agit des Cinq députés républicains élus au Corps législatif à l'occasion des élections partielles de 1858 : Jules Favre, Emile Ollivier, Darimon, Ernest Picard et Louis Hénon. Darimon avait présenté un amendement ayant pour objet le rappel de l'armée française d'occupation à Rome.
