CECI n'est pas EXECUTE 19 janvier 1879

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19 janvier 1879

Alfred de Falloux à Pauline de Castellane

19 janvier 1879*

Chère Madame,

Ma bronchite ne cède que très lentement son terrain et malheureusement je vois que vous n'êtes pas plus contente à Rochecotte. Je sollicite bien promptement un bulletin meilleur.

Je suis toujours stupéfait des réponses que vous ne communiquez de temps en temps. Celle-ci d'une façon presque grossière : je vous soupçonnais d'une indélicatesse et d'une bêtise, et je vous priais de vous arrêter dans cette voie. Ce n'est cependant pas cela qu'on a voulu dire ; mais il règne toute cette affaire un tel embarras, qu'on perd le jugement des qu'on en parle. Je répliquerais cela très doucement, très affectueusement, mais très clairement ; puis je disais toujours : et après ? Il est bien simple que je ne fasse rien, mais vous prêterez-vous indéfiniment à ne rien faire ?

Voudrez-vous bien présenter mes félicitations à Monsieur de Rocheplatte1 et dire à l'abbé Couvreux quand il sera de retour qu'on ne peut adhérer plus que je ne le fais au sentiment qui rend le pape responsable du journal de Rome ; aussi quand Léon XIII m'écrira pour me demander mon avis à ce sujet, l'abbé Couvreux peut être sûr que je répondrai avec la plus entière sincérité. Comme jusqu'ici c'est le baron d'Yvoire2 seulement qui m'a écrit, je ne peux répondre qu'à celui-là. Je lui donne deux conseils :1° d'avoir plus d'esprit 2° d'avoir plus de caractères. Suivra-t-il ces deux conseils la ? Quand je le saurais, je vous en informerai aussitôt ; en attendant je sais que Lavedan doit arriver à Rome à cette heure-ci ; il y va surtout pour les assurances sur la vie du pape. Monsieur Bontou y arrive en même temps de son côté, après avoir passé par Goritz3 où il va rendre compte du trafic des consciences dont il est chargé. Ce qu'ils ont dit ou ce qu'ils diront par rapport au Journal de Rome4 je l'ignore absolument ; mais je serais bien surpris s'ils ne le trouvent pas et ne le déclarent pas absolument funeste, à moins qu'on ne le tienne seulement pour absolument ridicule. Tout cela, chère Madame, vous scandalise-t-il beaucoup ? J'en serais bien fâché mais reconnaissez du moins qu'il y a des mystifications bien agaçantes !

A.de F.

P.S. Quelles nouvelles avez-vous de la princesse Wittgenstein5 ?

 

*Archives nationales, Fonds Castellane

1Marie Adrienne Jeanne dit Jenny Drouin de Rocheplatte, née Crublier de Fougères (1816-?).

2Yvoire, François Bouvier baron d' (1834-1918), journaliste et homme politique. Entré en contact avec Mgr Dupanloup dés 1863, il devint un de ses proches et accepta sur ses instances, de diriger le Journal des Villes et des Campagnes en 1867 mais renonça quelques mois plus tard. Originaire de Haute-Savoie, il se présenta en 1869 contre le candidat officiel de ce département et fut élu avec les voix de Jules Favre qui s'était désisté en sa faveur. Militant de l'opposition libérale, il accueillait souvent Mgr Dupanloup à Yvoire. Candidat malheureux sous la République, il revint au journalisme, prenant, en mai 1876 la direction de La Défense, le journal de l'évêque d'Orléans. Deux ans plus tard, il quitte la direction du journal et se rend à Rome, où il se verra confier la rédaction du Journal de Rome fondé par le comte Conestabile pour soutenir l'action de Léon XIII. Revenu quelques mois plus tard en Savoie, il se rapprochera du comte de Paris et accueillera favorablement le Ralliement.

3Résidence autrichienne du comte de Chambord.

4Voir note ci-dessus.

5Sayn-Wittgenstein, Léonille, née Bariatinsky (1816-1918), princesse d'origine russe, orthodoxe, elle avait été converti au catholicisme romain par Mgr. Dupanloup.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «19 janvier 1879», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1879,mis à jour le : 17/05/2016