1871 |
6 novembre 1871
Jules de Bertou à Alfred de Falloux
Rochecotte, 6 novembre 1871
Cher ami, merci de votre triste et intéressant billet de ce matin. Hélas s'il faut revoir l'Empire mieux vaudrait cent fois la grâce d'aller retrouver ceux qui nous ont précédé dans l'autre vie car celle-ci deviendrait tout à fait insupportable ! Voici la Gironde1 qui entreprend carrément une campagne en faveur de l'abdication2. Poujoulat répond mais d'un ton bien découragé, selon moi. Je suppose que Laurentie est en train de tailler sa plume et qu'il va éventrer le journal girondin ? L'abbé Feu a écrit ce matin à son ancien condisciple sur un ton qui ne donne pas la pensée qu'on puisse espérer le voir ici de sitôt : il parle d'un travail de son maître dont il aurait à revoir les épreuves. Je ne sais si c'est sur l'enseignement pratique et obligatoire et ce ne serait pas de trop assurément pour prendre une revanche de la pauvre petite lettre adressée au Journal du Loiret et avec laquelle le Journal des Débats faits joujou comme un vieux chat avec une petite souris en bas âge ! Il y a quelqu'un de qui on serait vraiment en droit d'attendre un travail de fond sur cette question mère et base de toutes les autres ; mais qui oserait le lui demander et cependant quel beau thème à laisser comme testament politique !
J'ai eu ce matin une lettre de votre frère3 très triste sans être nullement découragée.
La <mot illisible> devient de plus en plus hostile à l’Église et on peut redouter que l'ouverture du Parlement ne soit l'occasion de violences... Mais Monseigneur reste ferme à son poste et son calme paraît grand à mesure que le danger augmente. Nous nous apprêtons à vous recevoir dès que vous le pourriez.
En effet, j'ai lu tant de livres que j'avais négligé la chronique du Correspondant mais je vais le lire ce soir.
Jules
1Courrier de la Gironde, périodique orléaniste.
2En faveur de l'abdication du comte de Chambord.
3Mgr Frédéric de Falloux.
