CECI n'est pas EXECUTE 27 août 1877

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27 août 1877

Edouard de Fitz-James à Alfred de Falloux

Vesoul1, 27 août 1877

Mon cher Falloux,

J'ai reçu votre bonne lettre dans le Midi. Notre conseil général n'a duré que deux jours et c'était deux jours de trop vu les insanités qui y ont été débitées par la gauche.

J'ai protesté de mon mieux. Mais c'est bien triste de voir son pays s'en aller de plus en plus du côté de ces imbéciles coquins! Je serai à Segré le 12 septembre et je présiderai le comice bien imparfaitement à votre place2. Je trouve que malgré votre deuil3 vous pourriez bien le présider. Prendre la parole dans les circonstances où nous nous trouvons est un devoir et faire son devoir est œuvre pie et d'accord avec tout deuil. Je connais assez votre cœur pour savoir quels accents en sortiraient quelque soit la douleur qui les remplisse.

Je ne me présenterai pas dans la 2e circonscription de Nîmes car la partie est trop certainement perdue d'avance. Il y a trop de protestants dans cet arrondissement qui avec les mauvais catholiques me feraient succomber sous une minorité ridicule j'en suis convaincu. Le gouvernement me demande avec instance de me présenter mais je m'y refuse formellement. Si comme je l'ai demandé on avait déblayé le terrain devant vous et mis de côté la profession de Janvier de la Motte4, si on avait pris le duc d'Uzès5 comme candidat au lieu de Baragnon6 dans le Gard je me serais cru obligé d'aller recevoir des coups mais puisqu'il n'en a pas été ainsi je me tiens tranquille. Je ne sais si vos amis de Broglie et de Meaux vous on dit ce que je leur avais témoigné de leur inintelligence de n'avoir pas su vous faire une place. C'est pitoyable ! Et du jour où j'ai vu cela le succès de leur œuvre est devenu bien problématique pour moi !

Je vous écris de chez les Miramon7 qui vous envoient les plus affectueux souvenirs ils sont bien installés dans une jolie maison8 où ils voudraient bien vous recevoir ainsi que Loyde. Je retourne vendredi à Paris.

A bientôt, soyez l'interprète de mes respectueux et bien affectueux souvenirs auprès de Loyde et de Madame de Caradeuc et croyez toujours à ma très grande affection.

Fitz-James

 

1Commune de la Haute-Saône.

2Le comice agricole de Segré est habituellement présidé par A. de Falloux.

3A. de Falloux venait de perdre son épouse, Marie, décédée le 24 mai 1877.

4Janvier de La Motte, Louis Eugène (1849-1894), maire de Juvardeil, candidat bonapartiste dans la circonscription de Segré, il fut élu au 2ème tour contre le comte de Terves, légitimiste. Inscrit au groupe de l'Appel au peuple, il vota avec les 158 pour le gouvernement du Seize-Mai et, comme le prévoit ici Falloux, fut réélu très confortablement contre le républicain Robert. Ayant rejoint par la suite les rangs de l'Union républicaine, il ne retrouvera pas son siège, battu en 1881 par le comte de Terves.

5Crussol, Emmanuel Antoine de, 12e duc d'Uzès (1840-1878). Militaire et homme politique. Ayant Candidat indépendant malheureux au Corps législatif lors élections du 24 mai 1869, il sera élu le 8 février 1871 à l'Assemblée nationale dans la 2e circonscription du Gard (Uzès). Ayant pris place à l'extrême-droite il s'était fait inscrire à la Réunion Colbert et au Cercle des Réservoirs. Membre de de la commission du budget, il vota pour la paix, pour l'abrogation des lois d'exil, pour la pétition des évêques, pour la démission de Thiers, pour le septennat, pour le ministère de Broglie, contre l'amendement Wallon et les lois constitutionnelles de 1875.

6Baragnon Pierre Joseph Louis Numa (1835-1892), avocat et homme politique français. Légitimiste, il avait été élu député du Gard en 1871. Il entrera dans le deuxième gouvernement Albert de Broglie comme sous-secrétaire d'État à la vice-présidence du conseil et à l'Intérieur et fut nommé sous-secrétaire d'État à la Justice dans le gouvernement Ernest Courtot de Cissey. Député sortant de la 2ème circonscription du Gard, il avait été battu par le républicain Mallet. Sa réélection en octobre 1877, ayant été invalidée par la Chambre, il dut céder son siège à Mallet. Il sera élu sénateur inamovible le 15 novembre 1878.

7Le duc de Fitz-James était apparenté aux Miramon, sa fille, Marie-Yolande (1855-1925), ayant épousé, en 1874, Henri de Cassagne de Beaufort de Miramon (1852-1887).

8Le domaine des Bérenger de Miramon est situé Echenoz-la-Méline, près de Vesoul.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «27 août 1877», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1877,mis à jour le : 06/01/2017