1881 |
9 février 1881
Alfred de Falloux à Pauline de Castellane
Le 9 février 1881*
Non, non, chère Madame, je ne mérite pas et je ne désire pas d’indulgence ! Dites tout à Messieurs de Castellane1, tout à Galzot qui m’estime trop, tout au curé de Saint Patrice, qui se frotta les mains, en disant : voilà bien ces catholiques libéraux qui veulent régenter le pape et l’Église ! Il faut surtout que l’abbé Routaboul puisse par mon triste exemple, pénétrer ses élèves de l’importance de la géographie, en leur répétant : apprenez-la bien pendant que vous êtes jeunes et voyez d’avance la piteuse figure d’un vieillard ignorant ! La seule chose qui me fera une vraie peine en tout cela, c’est l’académie, parce qu’elle est innocente. Aussi lui aurais-je envoyé ma démission par le courrier même d’hier, si elle n’avait déjà, pour d’autres motifs, refuser la démission de l’évêque d’Orléans2 et si le cardinal de Richelieu n’avait posé en principe qu’il n’y a de cas rédhibitoires ni pour l’académie ni pour le sacré collège.
Le temps, redevenu subitement mauvais, n’a pas encore permis les promenades en voiture, mais Loyde est venue hier dans le salon et y a reçu Mme d’Armaillé3 plus jeune que jamais.
Les nouvelles du pauvre Bertou étaient un peu meilleures hier, mais encore trop énigmatiques pour être rassurantes ; si je ne me croyais encore nécessaire à la surveillance de Loyde et de la sœur qui fait tout ce que veut sa malade, je serais allé à Angers aujourd’hui, quitte à revenir dans le même jour, ce que le chemin de fer rend maintenant possible. C’est le courrier d’aujourd’hui qui probablement, en décidera pour demain. Je ne le ferai qu’en cas de véritables inquiétudes, car je m’étais bien promis de ne pas aller à Angers sans avoir la liberté d’aller jusqu’à Rochecotte. En tout cas, je ne passerai pas quelques heures à Saint-Martin sans vous écrire un but précis sur la table du pauvre malade.
A. de F.
*Archives nationales. Fonds Castellane.
1Antoine de Castellane et ses fils.
3D’Armaillé, Célestine Marie Amélie, née de Ségur de Ponchapt (1830-1918).
