CECI n'est pas EXECUTE 22 janvier 1878

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22 janvier 1878

Alfred de Falloux à Jules de Bertou

22 janvier 1878

Cher ami, j’attendais de vous une lettre datée de Beaumont, et je la reçois datée de Rochecotte, ce qui me déroute pour une commission à Tours. Je vais vous la donner néanmoins, quitte à ce que vous ne la fassiez pas, si vous n’avez plus d’occasion. Ernest a son frère Henry Bouin dans un régiment de dragons dont le colonel est M. de Louvencourt ; et le pauvre jeune homme est un excellent sujet qui s’inquiétait beaucoup du régiment et Ernest désirait beaucoup qu’il put entrer au service d’un officier. J’ai écrit, dans ce sens, une chaleureuse recommandation au colonel, il y a plus d’un mois : il ne m’a pas répondu, ce dont je ne puis ni m’étonner ni me plaindre ; mais cela ne me désintéresse par du pauvre Henry Bouin, et si vous y pouvez quelque chose par vos amis Tourangeaux, je suis bien sûr que vous l’essaieriez. En attendant, je n’en dis rien à Ernest, et je ne vous révélerais qu’en cas de succès.

Dites à Amédée de La Haye1 que je compte sur lui pour vous réduire à un silence salutaire et vous mettre ainsi bon gré mal gré en état de revenir promptement au Bourg d’Iré où règne un état passable que je n’aperçois pas clairement à Rochecotte, puisque Madame de Castellane recourt toujours au sulfate de quinine. Et Melle Levreux ? Et l’abbé Couvreux ? Comment les avez vous trouvés ? Les projets de Paris persévèrent-ils toujours et ont-ils une date fixée ? Je m’applaudis que le duc de Chaulnes2 demeure à Cannes, à une certaine distance de la duchesse 3; mais va-t-il tenir longtemps à ce régime, et quel est le langage des médecins à son égard ? Que devient la duchesse de Chevreuse4, au milieu de tant de gens dispersés et qui probablement ne l’appellent guère ?

Mon frère5 a envoyé à sa nipote6, par le cardinal de Rennes7, un reliquaire d’une rare beauté religieuse et artistique. L’abbé Bourdon8 a bien voulu l’apporter lui même, et les nouvelles de Rome, échos de l’archevêché, présentent l’état du Pape9 absolument incurable. Mais le cardinal a été si malade10 pour son propre compte qu’il est revenu en toute hâte chez lui sans attendre un conclave qu’on croît toujours imminent. Au revoir ! Au revoir !

Alfred

 

Vous avez dû recevoir hier une lettre renvoyée d’ici timbrée du chemin de fer du nord et qui a été retardée par l’incertitude où nous étions sur vos mouvements.

1Amédée Joseph Augustin de Bernabé de La Haye (1806-1880).

2Paul d'Albert, duc de Luynes, duc de Chaulnes (1852-1881).

3Chaulnes, Marie-Bernardine Blanche Sophie (1852-1882), duchesse, fille du prince Augustin Galitzin mariée en 1875 à Paul d'Albert de Luynes, duc de Chaulnes (1852-1881).

4Julie Valentine de Contades, duchesse de Chevreuse (1824-1900), veuve d'Honoré d'Allbert de Luynes, duc de Chevreuse (1823-1854).

6Nipote, nièce en italien, soit Loyde, la fille d’Alfred de Falloux.

7Charles Philippe Place (1814-1893) succéda, le 15 juin à Mgr Brossay Saint-Marc à la tête de l'archidiocèse de Rennes. Ordonné prêtre en 1850, il fut vicaire de Mgr Dupanloup à Orléans, puis partit séjourner à Rome comme auditeur de Rote pour la France. Préconisé évêque de Marseille en 1866, il fit partie de la minorité opposé au dogme de l’infaillibilité pontificale. Autant dire que Mgr Place était plutôt de l'école de Mgr Dupanloup que de celle de Mgr Pie.

8Père Augustin Bourdon (1820-1911).

10Il devait mourir quelques jours plus tard, le 26 février.²²²


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «22 janvier 1878», correspondance-falloux [En ligne], 1878, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Troisième République,mis à jour le : 12/02/2019