CECI n'est pas EXECUTE 8 novembre 1880

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8 novembre 1880

Alfred de Falloux à l'abbé Couvreux

8 novembre 1880*

Cher Monsieur l’abbé, je m’empresse d’envoyer la lettre au duc de Broglie avec prière de la renvoyer à vous et à moi aussitôt qu’il l’aura lue. Pour mon compte, je ne trouve de vrai et de pratique là-dedans que ce qu’il dit d’infiniment juste sur le Correspondant et sur le Français et j’insiste là-dessus près de M. de B[roglie] comme je vais le faire tout à l’heure près de Lavedan qui traverse le Bourg d’Iré retournant de Nantes à Paris, avec son fils le dragon, au terme de son volontariat. Quant au voyage à Rome, il est évident qu’à cette heure-ci un sénateur ne peut quitter le Sénat et pour moi, je n’ai jamais aperçu la moindre signe direct ou indirect qu’on m’y désirât. Toutefois, ce n’est pas là ce qui m’arrête mais la conviction bien ancienne que Dieu ne multiplie pas les obstacles, comme il le fait pour moi, chez ceux dont il veut se servir. En outre, je ne crois pas à cet isolement d’un pape1, qui a nommé douze ou quinze cardinaux depuis qu’il est sur le trône, qui a des nonces, qui reçoit par an une centaine d’évêques de toutes les nations et qui peut lire tous les journaux de l’Europe. Si avec cela un pape de 70 ans n’a pas des idées arrêtées, aucun voyageur ne lui en donnera. Je n’en redoute pas moins un coup de bascule, après la très belle lettre de la semaine dernière 2au cardinal Guibert3, et depuis huit jours, je ne cesse de multiplier dans mes lettres mes avertissements et les supplications, mais si ce malheur nous arrive, je vous annonce, cher Monsieur l’abbé, que je ne m’en prendrai ni au duc de Broglie ni à moi, mais au caractère de Léon XIII lui-même.

Comme je voudrais voir les très petits chérubins4 sur leur cheval-chien et dans leur panier !

 

 

Qu’est-ce qu’Henri de Juigné5 a été faire à Frohsdorf6, Y a-t-il parlé avec une respectueuse sincérité ? Nous vous demandons tous bien promptement, cher Monsieur l’abbé, de meilleures nouvelles de Madame de Castellane.

A. de F.

 

 

 

*Archives nationales. Fonds Castellane.

 

 

 

 

 

2Le 22 octobre 1880, le Bref adressé par Léon XIII à Mgr Guibert, archevêque de Paris, soulignait que dans l’affaire des congrégations les torts avaient été également partagés entre le gouvernement partagés entre le gouvernement français et les catholiques extrêmes.

3Mgr Guibert, Joseph-Hippolyte (1802-1886), archevêque de Paris. Nommé évêque de Viviers en 1841, puis archevêque de Tours en 1857, il était plus gallican que libéral. Il ne montra guère de sympathie pour L’Univers. Il avait été nommé archevêque de Paris en 1871 en remplacement de Mgr Darboy tombé sous les balles des Fédérés.

4Les petits-enfants de Pauline de Castellane.

5Charles Léon Ernest Le Clercl, marquis de Juigné (1825-1886), homme politique. Propriétaire du château de Juigné-sur-Sarthe (Sarthe), il était membre de l'Assemblée nationale du 8 février 1871 où il siégeait avec les légitimistes; il était inscrit à la réunion Colbert et à celle des Réservoirs. Le comte et le marquis sont cousins. Plus modéré que son cousin, le marquis est un proche de Falloux. Sa fille Madeleine (1847-1934), était, depuis 1866, l’épouse d’Antoine de Castellane, fils de Pauline de Castellane.

6Résidence autrichienne du comte de Chambord.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «8 novembre 1880», correspondance-falloux [En ligne], 1880, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Troisième République,mis à jour le : 12/04/2019