1880 |
22 mai 1880
Alfred de Falloux à Jules de Bertou
Paris le 22 mai 1880
Cher ami,
Je suis très touché de votre sollicitude pour ma conférence ; je vais aller tantôt à la bibliothèque de l’institut pour y chercher ce que vous m’avez indiqué, et j’y chercherai de même ce que vous m’indiquerez encore.
Mais, je ne prends aucun engagement, car mon plan n’est nullement arrêté. J’en repousse même la pensée jusqu’à lundi afin qu’il ne me tourmente et ne me fatigue pas trop d’ici à jeudi. Seulement je refuse tout dîner, même à Mme de Castellane afin de reposer ma poitrine toujours fort portée à l’irritation.
Quant à la publicité, j’ignore ce qu’on fera ; c’est M. Chesnelong qui dirige tout et j’ai tout remis entre ses mains sans en prendre aucun souci. C’est à ceux qui me font parler bon gré mal gré à s’en occuper. Si toutefois, j’apprends quelque chose à ce sujet, je vous en ferai part.
Que devient Cumont? Personne n’en entend plus parler. Le pauvre André1 va mal finir et ce sera certainement un malheur pour L’Union de l’Ouest.
L’école des frères vient d’être rouverte à Segré et à Saint-Gemme2, mais pour combien de temps !
L’évêque d’Angers3 vient enfin d’écrire à l’évêque de Quimper4 et en a reçu une réponse très bretonne. Cela ne l’arrêtera pas plus que le reste est pas plus que le journal de M. Dufaure qui proteste énergiquement contre cette candidature. Le nonce5 et l’archevêché de Paris6 parle aussi dans le même sens, mais ils ne disent pas ce qu’ils ont fait ou font.
On a pas encore de nouvelles de Pérignon7 par Albert [de Rességuier]. Berthe8 n’a pu le suivre, Camille Benoist9 ayant la scarlatine. Le prince Radziwill10 est reparti hier après trois jours d’assiduité à la rue de Grenelle et vous envoyant les plus affectueux souvenirs. Pour moi vous savez ce que j’y ajoute.
Alfred
1Il est le rédacteur en chef de L'Union de l'Ouest que dirige alors Arthur de Cumont.
2Saint-Gemmes d’Andigné, commune du Maine-et-Loire, proche de Segré.
4Nouvel de La Flèche, Anselme (1814-1887), évêque de Quimper et de Léon depuis 1872.
5Czacki Włodzimierz, Mgr (1835-1888). Nommé par Léon XIII à la nonciature de Paris, il fut chargé d'appliquer la nouvelle politique du Saint-Siège et en particulier de convaincre les catholiques de ne plus lier leur intérêts à la cause royaliste et d'accepter les nouvelles institutions que la France s'était données. Secrétaire de la Congrégation des Études de 1875 à 1877, secrétaire de la Congrégation des Affaires ecclésiastiques extraordinaires de 1877 à 1879, nonce à Paris en 1879, cardinal en 1882.
6Mgr Guibert, Joseph-Hippolyte (1802-1886), archevêque de Paris. Nommé évêque de Viviers en 1841, puis archevêque de Tours en 1857, il était plus gallican que libéral. Il ne montra guère de sympathie pour L’Univers. Il avait été nommé archevêque de Paris en 1871 en remplacement de Mgr Darboy tombé sous les balles des Fédérés.
7Demeurant dans leur château, à Finham (Tar-et-Garonne), les Pérignon sont alliés des Rességuier, une des filles d'Albert de Rességuier, Geneviève (1842-1904) ayant épousé Dieudonné Henri Marie de Pérignon (1840-1889).
8Berthe Benoist d'Azy (1850-1899) née de Rességuier, fille d'Albert de R.
9Benoist d’Azy, Camille (1876-1912).
10 Frédéric-Guillaume-Antoie, prince Radziwill (1833-1904), militaire prussien. IL était l’époux de Marie, fille de Mme de Castellane.
