Année 1848 |
18 mai 1848
Alfred de Falloux à Louise de Falloux
Paris, 18 mai 1848
Chère maman,
J'ai à vous annoncer une nouvelle qui vous fera plaisir, c'est ma nomination dans la commission d'enquête des travailleurs. C'est celle à laquelle l'Assemblée attachait le plus d'importance et cela prouvera (si on peut leur prouver quelque chose) aux républicains de notre pays que les républicains de Paris sont moins difficiles qu'eux. Quant à vos inquiétudes générales, je voudrais être en mesure de vous rassurer pleinement mais personne ne le peut. L'Assemblée désormais est suffisamment connue pour qu'on sache parfaitement que la majorité est toute dévouée à l'ordre; le péril est dans la double présence de M. Ledru[-Rollin] et de M. Lamartine au pouvoir. M. de Lamartine promet d'absorber Ledru[-Rollin] mais le peut-il et même le veut-il? là est le problème. Si Lamartine est franc et ferme, l'assemblée le soutiendra avec enthousiasme, mais s'il travaille à la démoraliser on ne peut prévoir jusqu'à quel point il réussira prés d'un grand nombre de membres tout à fait inexpérimentés et dont beaucoup font déjà la cour au pouvoir et la chasse aux places. Prenez donc courage et patience; en tout cas les chances sont plutôt bonnes que mauvaises et Paris se montre de plus en plus calme. On nous annonce bien aujourd'hui une démonstration pour la Pologne. Je crois que ce sera peu de chose. J'ai vu les Mackau et les Louis de Fitte1, tous en bon état.