CECI n'est pas EXECUTE 22 mars 1882

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22 mars 1882

Ferdinand Roze à Alfred de Falloux

Paris 22 mars 1882

Quel embarras est le mien, Monsieur le comte, et dans quel abîme de perplexité, je me vois plonger ! Je ne crois pas qu’il soit possible à M. Jardry1 de démordre de ses calculs et d’autre part les 500 pages paraissent vous effrayer. Dès lors, que retrancher ? Je lis, je relis et je ne résous pas la question ; il n’y a pas une page, dans ce que nous pourrons retrancher, qui n’ait son intérêt et le sacrifice me coûte.

J’avais pensé à supprimer la lettre à la Gazette de France et vous aviez acquiescé à ma proposition. Mais voilà que M. de Rességuier n’est pas de notre avis ! Il trouve et je n’y contredis pas la lettre fort intéressante et voudrait la garder. Je lui ai d’ailleurs remis l’estimation afin qu’après une nouvelle lecture, il nous fasse part de ses impressions.

Aujourd’hui, j’arrive avec une proposition nouvelle, ce serait de ne garder de la brochure : Des élections prochaines que 4 pages relatives à l’abstention qui, ainsi détachées n’en formeront pas moins un tout complet. Nous les ferions précéder de quelques lignes ainsi conçues ou à peu près :

Les pages suivantes sont extraites d’une brochure publiée par M. de Falloux en 1869 sous ce titre : Des élections prochaines.

Non que je trouve le reste dépourvu d’intérêt, mais sacrifice pour sacrifice, peut-être celui-là serait-il moins douloureux. Je n’en ai pas moins fait sur la brochure toutes les corrections et suppressions que vous m’avez indiquées; mais je n’ai procédé à un travail personnel que sur 4 pages relatives à l’abstention, en attendant votre décision pour le reste.

J’ai cependant quelque explication à vous demander pour le reste dans le cas où nous les maintiendrions.

Conservez-vous les sous-titres de la brochure : l’abstention, la division l’organisation, le but.

Sinon je crois qu’il ne faudrait pas annoncer cette subdivision dans la page 7.

Si oui, ne craignez-vous pas une disproportion un peu forte entre l’abstention et les autres parties ?

La Division n’aura plus que 4 pages. Quant à l’organisation, en reste-t-il quelque chose ? Sur ce point, je demande un éclaircissement à vos notes ; après m’avoir dit :

page 62 reprendre à : si la gauche venait à conquérir le pouvoir jusqu’à : catholiques vous verrait ce qui attend l’Eglise.

Vous me dites immédiatement : page 66 tout supprimer à partir de cette page jusqu’à la page 77.

Que deviennent les pages 64 et 65? Les maintenez vous ? Alors, l’organisation aura deux pages ; c’est bien peu et je crois qu’il faut tout supprimer.

Je reviens à l’Itinéraire. Voici à quelle partie nous nous sommes arrêtés M. de Rességuier et moi. Nous avons pensé que les en-têtes devaient être un simple exposé des faits, bien sec et sans commentaire.

Je commence donc l’entête de la question italienne à ces mots : le 1er janvier 1859, l’Empereur, recevant le corps diplomatique etc. (je cite de mémoire, j’ai tout laissé à M. de Rességuier) après avoir cité les paroles de l’empereur je dis :

Ces paroles causèrent une telle émotion que le 7 janvier le gouvernement crut devoir publier dans le Moniteur une note ainsi conçue etc. Nous n’avons pas touché à la suite .

Quant à l’en-tête du devoir nous le supprimons. Seulement, à la date de l’article, nous mettons le signe d’une note et au bas de la page la note suivante :

« Au moment où ces lignes étaient écrites, les états pontificaux n’avaient pas encore été envahis par l’armée piémontaise, mais on considérait une invasion comme imminente. »

Je ne crois pas que votre peu de goût pour les notes doive vous arrêter : car veuillez remarquer que le signe de la note étant mis à la date, c’est-à-dire, avant le commencement de la brochure, le lecteur ne sera pas arrêté en cours de lecture.

Même procédé pour les Antécédents et conséquences. Pas d’entête ; une note à la date. Cette note est la suivante, empruntée à l’entête que vous m’avez adressé :

« Sans déclaration de guerre, sans sommation préalable, l’armée piémontaise avait envahi les états pontificaux. Surpris à Castelfidardo, le général de la Moricière et ses compagnons d’armes s’étaient défendus héroïquement, mais ils avaient été forcé de céder au nombre et de se réfugier dans Ancône où ils furent immédiatement assiégés.

Enfin pour la convention du 15 septembre, nous disons tout simplement :

le 15 septembre 1864, était conclue entre la France et l’Italie la convention suivante:… la convention était suivie d’un protocole ainsi conçu:…

Je crois que cela vaut mieux ainsi. Je retourne en arrière. Notre entête sur la question italienne est un peu la répétition de la page 92 de la brochure. Mais je ne crois pas qu’il y ait lieu de s’arrêter à cette objection, parce que page 92 vous ne citez pas les paroles à Monsieur Hübner2 et surtout parce que la page 92 est la page 92 et qu’il me paraît essentiel de rappeler aux lecteurs, dés le début de la brochure, le discours de l’Empereur et celui de Monsieur de Morny3. C’est une initiation nécessaire aux pages qu’il va lire.

P. 55. vous me proposez, au lieu de nous avions déjà vu des royalistesde dire on avait déjà vu… Pour éviter nous nous (car nous remplaçons à la phrase précédente dans ce recueil par nous. J’aimerais conserver : nous avions déjà vu… qu’il paraît plus personnel et plus précis. Et il me semble que l’inconvénient disparaîtrait suffisamment en remplaçant dans ce recueil par nous-mêmes au lieu de nous.

P. 55.

Je vous signalais ces mots : (je rougirais de l’assurance même deviendrait un doute à cet égard). Vous me répondez : « Supprimez la parenthèse, il n’y aura pas de difficultés », hélas ! Hélas ! À ma honte, j’avoue que je ne comprends pas mieux. Voulez-vous dire : « je rougirais qu’on put émettre un doute à cet égard ?

p. 76. Il s’agit de la note, mais le malheur est que je n’ai pas la brochure sous les yeux, de sorte qu’il m’est difficile de préciser mon objection. Si je ne me trompe vous indiquez une brochure de Monsieur Villemain ou de l’évêque d’Orléans, sans en donner le titre c’est mon objection était celle-ci : le titre était alors présent à toutes les mémoires, mais aujourd’hui il est oublié. Si je me trompe, ne me répondez pas ; je préciserai avec la brochure sous les yeux.

P. 102/ M. de Rességuier a retrouvé le titre de la fameuse brochure : le Pape et le congrès. Voici la note que je vous propose :

La brochure au moyen de laquelle il est fait allusion ici avait pour titre : le pape et le congrès. On l’attribuait à Monsieur de la Gueronnière4 et on s’accordait à y voir l’expression des sentiments de l’Empereur.

Ou bien:… on attribuait à Monsieur de la Gueronnière qui plus tard reconnu en être l’auteur et qui passait alors pour être l’interprète des sentiments de l’empereur.

Page 103. Vous me proposez : Pendant ce temps une légèreté imprudente régnait dans le presse française et dans la presse italienne. Les actes politiques gardaient de moins en moins le respect humain ; les annexions étaient consommées et les mains qui… je voudrais éviter humain et mains. Je chercherai.

P. 119 je supprime la note qui ferait emploi avec celle que nous mettons en tête de la brochure : (voir plus haut)… et je vais tout simplement en note ici : le général de la Moricière.

P. 134 du petit, du faible… je vois que le petit vous tient au cœur. Et que ce serait un sacrifice que vous me feriez. Ma responsabilité s’effraie et veut s’abriter derrière celle de Monsieur de Rességuier, je le consulterai.

Je reviens au parti catholique en ce moment à l’impression. Je n’ai donc pas la brochure sous les yeux, du moins la brochure dans le format que vous avez. J’ai un autre format que vous m’aviez aussi remis au beau direct, indication de la page vous dirait encore rien.

Je vous renvoie au passage où après avoir parlé du vote de la loi de 1850, vous constatez l’attitude de l’univers, puis inachèvement de la tâche, point de vue de l’enseignement, puisqu’il restait à obtenir l’enseignement supérieur. Le paragraphe qui commence à : l’ancien parti catholique ne tendait plus… Se termine ainsi : ce cabinet avait éludé, autant que l’assemblée le lui avait permis… etc. (autre indication : c’est presque la fin du chapitre qui se termine à ces mots : voyons donc maintenant le journalisme dans l’action).

Voici où je veux en venir. Dans la conférence de Grenelle, parlant de Monsieur de Parieu, vous dites : Monsieur de Parieu mon très loyal et très courageux successeur, a défendu la loi qui n’avait pas présenté et que son éloquence vigoureuse a grandement contribué à faire prévaloir. Monsieur de Parieu a dit lui-même sans déguisement ses motifs au Sénat. »

N’y a-t-il pas là un contraste avec l’attitude de Monsieur de Parieu, telle qu’elle ressort de divers passages du Parti catholique où vous parler de lui ? Attitude sinon absolument hostile à la loi, au moins des plus tièdes. Je tiens à vous le signaler : car nous serons encore à temps de modifier sur les épreuves. Encore une volumineuse lettre ! Que vous devez être fatigué de ma prose ! Veuillez agréer, Monsieur le comte, l’assurance de mon profond et respectueux dévouement.

F. Roze

Mes amitiés je vous prie à M. Penaud.

1F. Roze et A. de Rességuier assisté de Jardry collaboraient à l’édition d’un ouvrage de Falloux rassemblant certains de ses discours et articles qui allait paraître sous le titre de Discours et mélanges politiques, Paris, Plon, 1882.

2Hübner, Joseph Alexandre, baron von (1811-1892), diplomate autrichien. Il est alors ambassadeur en France.

3Morny, Charles-Auguste-Louis-Joseph, duc de (1811-1865), demi-frère de Napoléon III. Après avoir fait carrière dans l’armée puis s’être occupé d’agriculture et d’industrie, il se tourna vers la politique. Élu député en 1842, il soutint la politique de Guizot. Représentant à la Législative  (1849), il vota avec le parti de l’Ordre. Principal organisateur du coup d’État du 2 décembre, il donna sa démission de ministre de l’Intérieur après le décret sur les biens des Orléans. Président du Corps législatif à partir de 1854, et jusqu’à sa mort, il fut nommé ambassadeur extraordinaire de France à Saint-Pétersbourg en 1856.

4Guéronnière Louis-Etienne Arthur Dubreuil Hélion de la, vicomte (1816-1875), journaliste et homme politique. D’une famille légitimiste, il fut disciple et ami de Lamartine. Il commença par combattre le coup d’état, puis se rallia au régime. Élu en 1852 député du Cantal, il devint conseiller d'État. Nommé directeur général du service de la presse et de la librairie, il rédigea plusieurs brochures inspirées par l’Empereur dont, L’Empereur Napoléon et l’Italie (février 1959) qui le rendit célèbre. Le texte préconisait une fédération italienne présidée par le pape et affirmait la nécessité d’une aide étrangère pour asseoir la nationalité italienne. Nommé sénateur en 1861, il fonda en 1862 La France, journal impérialiste. Il fut nommé ministre plénipotentiaire à Bruxelles en 1868, ambassadeur à Constantinople en 1870. Il mourut presque miséreux.


 


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «22 mars 1882», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1882,mis à jour le : 16/11/2020