CECI n'est pas EXECUTE 29 septembre 1871

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29 septembre 1871

Franz de Champagny à Alfred de Falloux

Trois moulins par la Seine-et-Marne, 29 septembre 1871

Très cher confrère, votre idée est excellente et me paraît de beaucoup la meilleure solution. Ce qu’il faut maintenant c’est de la propager le plus activement possible pour que l’idée opposée ne prenne pas les devants. Je ne sais pas quand aura lieu le jugement. On en avait parlé l’autre semaine et il avait été convenu de s’associer d’abord si l’allocation ordinaire avait été portée au budget rectifié de 71. Puis hier il n’en a pas été reparlé (c’est ainsi que les choses se passent dans les assemblées, même lorsqu’elles ne sont composées que de six personnes ce qui était notre fait) mais, en sortant, on n’en causé et l’idée de Madame Sand1 nous est revenue sur le tapis.

On lui opposait Monsieur Guizot et certes je l’accepterais volontiers. Mais j’en sens comme vous toutes les difficultés dans le public ; je sens aussi toutes celles que ferait l’Institut pour le choix de Mgr Darboy2. J’abonde tout à fait dans le sens de Monsieur Leplay3.

Vous m’avez mal compris quand j’émettais l’idée d’un recours au pouvoir. Ce ne serait pas pour faire supprimer le prix, Dieu m’en garde. Ce serait pour en changer les conditions pour éviter cette impasse dans laquelle l’académie retombera toujours forcée ou de nommer un inconnu ou de nommer un académicien. C’est même ce qu’on fait valoir en faveur de Madame Sand. C’est qu’étant femme, elle peut avoir été très grand écrivain sans être de l’académie. Ce que je voudrais c’est que les 2000 Fr. qui échoient tous les ans à chaque <mot illisible> de l’institut d’après les termes de la fondation, puissent être <plusieurs mots illisibles> être employés à couronner, quand elle le jugerait à propos tel livre éminent qui viendrait à paraître. Cela en quelques combinaisons analogues. Mais peu importe en ce moment le plus pressé est d’avoir un candidat à produire si l’académie se trouve trop embarrassée, elle aura la ressource de cette adresse au pouvoir.

Adieu ; nous sommes ici dans la crise des élections4 et le parti conservateur est comme toujours pris au dépourvu et ne sachant que faire. L’État de nos populations est bien triste, elles sont autour de vous infiniment meilleures mais n’ont-elles pas beaucoup perdu ?

Vous ne me parlez pas de votre santé ni de celles qui vous touchent de plus près. Cependant vous êtes là trois non pas malades je l’espère, mais sujets à bien des peines de ce genre. Présentez je vous prie à ces dames mes respectueux hommages et croyez à mes sentiments tout dévoués.

Champagny

1Attribué, la première fois, à l'initiative d'A. de Falloux à A. Thiers, ce prix de 20.000 francs délivré par l'académie était sollicité par la célèbre femme de lettres.

2Mgr Darboy, Joseph (1813-1871), archevêque de Paris depuis 1863 et sénateur. De tradition gallicane, Mgr Darboy faisait partie, aux côtés de Mgr Dupanloup, de la minorité des prélats qui souhaitaient le rejet de la définition de l’infaillibilité. Pris comme otage par la Commune, il avait été fusillé le 24 mai à la prison de la Roquette.

3Le Play, Frédéric Pierre Guillaume (1806-1882), ingénieur des mines et homme politique. Sociologue emprunt d’un conservatisme certain, il se montra favorable à l’Empire et fut appelé à siéger au Sénat en 1867. Précurseur du corporatisme moderne, il se vit décerné le prix Montyon de l’Académie française pour ses travaux scientifiques.

4Élections législatives de juillet 1871 à l’Assemblée nationale.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «29 septembre 1871», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1871,mis à jour le : 07/01/2021