CECI n'est pas EXECUTE 7 mars 1878

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7 mars 1878

Alexandre Apponyi à Alfred de Falloux

Lengyel1, 7 mars 1878

Mon bien cher comte

Je suis bien heureux de pouvoir aujourd’hui vous donner une nouvelle dont vous vous réjouirez avec moi, comme se serait réjoui mon cher père2. Je suis fiancé, et je me sens heureux, plus heureux que je n’avais jamais cru pouvoir le devenir. Il faut me pardonner de ne pas vous avoir écrit plutôt, et surtout de ne pas en vouloir à ma bonne mère3 à qui j’ai dit que je vous écrirai. Je ne l’ai pas fait et je m’en assure. Mais j’ai parlé de vous à ma fiancée dès le premier jour. Elle pourra vous le dire quand nous aurons la joie de vous voir. Je lui ai dit que vous avez été le meilleur ami de mon père, que je ne connais personne qui prie plus d’intérêt à mon bonheur, et qu’elle pourrait compter sur une vraie affection de votre part.nous avons le même nom, ma fiancée et moi, et nous sommes nés à la même date, à 12 ans de distance. Alexandrine Esterhazy4 née le 18 janvier 1856. Elle a été élevée par la mère la plus charmante et la plus distinguée qui s’est vouée uniquement exclusivement à l’éducation de sa fille.Elle a vraiment toutes les qualités du cœur et de l’esprit. C’est une phrase bien banale, mais quand ce n’est pas une phrase, c’est beaucoup. Elle est belle, de l’aveu, je crois de tout le monde et elle m’aime, je puis vous le dire n’est-ce pas ? de tout son cœur. Ma bonne grand-mère a toujours eu un faible pour elle. Elle a comme enfant et <mot ill> car les Esterhazy habitent Presbourg5 depuis 20 ans. Ma mère a passé une quinzaine à Presbourg pour voir ma tante Marie, et elle a donc pu voir Alexandrine avant que nos fiançailles n’aient eu lieu, elle a pu apprécier sa future belle-fille et me féliciter de mon choix. Elle aurait bien voulu entendre le dévouement mais elle a cru mieux faire pourtant de partir pour Rome comme elle en avait eu le projet. Je l’y ait accompagnée. Nous sommes arrivés le lendemain de la mort du pape, et malgré l’intérêt de Rome, je suis reparti au bout de trois jours. J’ai rapporté à Alexandrine des fleurs que ma mère lui envoyait. Quand je suis revenu chez elle une heure plus tard, elle les avait mises dans ses cheveux et je vis alors que ma demande serait agréée. Je ne puis hélas ou donner autant de détails que je le voudrais. Laissez-moi vous dire que tout en elle me charme et me plaît et que je remercie tous les jours le bon Dieu de m’avoir fait trouver un pareil trésor. Je voudrais bien être auprès d’elle et lui dire que je vous écris. Mais j’ai du venir passer une huitaine de jours à la campagne où j’ai une foule d’affaires à régler. Nous attendons ma mère les premiers jours d’avril et ma sœur pour la semaine sainte. Le mariage aura lieu probablement le 24 avril. Je vous écrirai encore des syllabes pour être bien sûr que vous pensez à nous le grand jour.

Au revoir, mon bien cher comte, - pater venerande – pensez quelquefois à moi. Je ne puis assez vous dire combien vous êtes toujours présent à mon esprit et à mon cœur. Croyez pour la vie à mes sentiments de dévouement et de tendre attachement.

Alexandre

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Hotel Grune Baum, Presbourg

1Le château de Lengyel dans le comté de Tolna, en Hongrie, est la propriété de la famille Apponyi.

2Apponyi, Rodolphe II (1812-1876), diplomate. Il fut ambassadeur à Londres de 1856 à 1871 et de 1872 à sa mort.

3Anne Apponyi, née van Benckendorff (1818-1900).

4Alexandra Esterhàzy de Galàntha (1856-1930).

5Ville de Hongrie, aujourd’hui Bratislava, capitale slovaque


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «7 mars 1878», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1878,mis à jour le : 11/02/2021