CECI n'est pas EXECUTE 7 août 1877

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7 août 1877

Bernier à Alfred de Falloux

Segré, le 7 août 1877

Monsieur le comte, j’ai bien regretté de ne m’être pas trouvé à mon domicile lorsque vous y êtes venus pour m’entretenir m’a dit de l’affaire se rapportant à la distribution des prix de l’école des frères de Segré. J’ai d’autant plus regretté mon absence qu’il aurait été facile de vous expliquer ma conduite dans cette affaire et vous auriez bien vite reconnu que je ne pouvais agir autrement que je l’ai fait.

Sans doute, vous, toujours si bon, toujours prêt à rendre service aux personnes qui se trouvent dans la peine vous avez pris fait et cause pour le frère directeur de Segré menacé d’une peine disciplinaire. Je ne puis que vous approuver et même vous savoir bon gré de votre intérêt et de votre démarche en faveur de mon instituteur peu soumis. Seulement mon rapport était fait, et quand même il ne l’aurait pas été il m’était impossible de ne pas en faire un contre lui, attendu qu’il se trouvait en récidive dans l’infraction qu’il a commise, et que, si j’avais laissé passer ce fait sans le faire connaître, tous les instituteurs et tous les institutrices auraient eu nécessairement le droit d’en faire autant et même davantage, sans que j’eusse eu moi le droit de leur faire un simple reproche. Leur réponse était d’ailleurs facile : « vous laissez bien faire à Segré et même vous arrêtez avec plaisir à ces représentations » et pour moi quelle réponse à faire ensuite ?

Il y a là un point de discipline des plus sérieux et des plus graves pour un corps constitué. Vous le savez mieux que moi, Monsieur le comte, s’il n’y a pas dans une administration le respect aux lois et l’obéissance aux autorités l’anarchie règne et il n’y a plus de société possible.

De plus, ce frère, a eu le très grand tort de m’insulter et de m’injurier grossièrement lorsque je l’ai fais venir chez moi pour lui demander des explications sur le fait incriminé. Il s’est substitué à moi et c’est lui qui m’a fait la réprimande.

Depuis même, on m’a dit qu’il ne se gêne pas pour dire qu’ils se moque de moi et de tout ce que je voudrais faire contre lui. Mais comme il me faudrait faire des recherches pour arriver à la source de ces propos, je ne m’en occuperai pas du tout.

Le frère directeur, sans doute ne vous a point expliqué l’affaire dans ses détails, et vous deviez tout naturellement ajouter foi à ses paroles. Mais je vous le répète, Monsieur le comte, je ne pouvais plus rien quand vous êtes venus chez moi. Cette affaire devra maintenant suivre son cours, libre à Monsieur le préfet, juge dans ce cas, d’apprécier à sa manière et je ne doute pas que ce soit de manière très équitable.

J’aime à croire que vous comprendrez la situation délicate dans laquelle je me suis trouvé dans cette occasion, et je vous prie de vouloir bien être assuré que j’aurais été heureux de pouvoir vous êtes agréable s’il n’avait dépendu d’un devoir sérieux à remplir, quoique la chose par elle-même fut de peu d’importance.

Veuillez agréer, Monsieur le comte, l’assurance de mes sentiments respectueux et bien dévoués.

L’inspecteur principal

Bernier


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «7 août 1877», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1877,mis à jour le : 02/03/2021